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    Nouvelle Calédonie
  • Par Yann Mainguet et Charlie Réné | Crée le 20.09.2018 à 04h25 | Mis à jour le 20.09.2018 à 10h49
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    La devise, l’hymne et le graphisme des billets de banque ont été adoptés en août 2010 par le Congrès. La population devait alors se les approprier, et les institutions les inscrire dans une réalité. Photos Archives LNC
    Trois des cinq signes identitaires, la devise, l’hymne et le graphisme des billets de banque, sont aujourd’hui acceptés. Très sensibles, les questions du nom et du drapeau sont loin d’être tranchées.

    Le cadre

    Le point 1.5 de l’accord de Nouméa, dédié aux symboles, prévoit que « des signes identitaires du pays, nom, drapeau, hymne, devise, graphismes des billets de banque, devront être recherchés en commun pour exprimer l’identité kanak et le futur partagé entre tous ».

    Option retenue par un comité de pilotage composé en 2007 de politiques de tous bords, de syndicalistes, de coutumiers, ou encore de représentants des églises, un concours populaire aboutit à un résultat en 2008 pour les trois signes identitaires étudiés : la devise de la Nouvelle-Calédonie est « Terre de parole, terre de partage » ; l’hymne, « Soyons unis, devenons frères » ; et le graphisme des billets de banques évolue (couleurs vives, poissons cochers, nautile, feuilles de taro, etc.).

    Si un consensus du jury pour la désignation des lauréats est noté, le Congrès adopte à une large majorité des élus - cinq abstentions, celles d’un représentant du RPC et quatre du Parti travailliste - ces trois signes par une loi du pays le 18 août 2010. Signes que les Calédoniens se sont, plus ou moins, appropriés aujourd’hui. Reste le nom du pays et le drapeau. Le plus dur.

    Le double drapeau

    Pierre Frogier, député, président de la province Sud et patron du Rassemblement UMP, propose, début février 2010, d’associer le drapeau tricolore à l’étendard du FLNKS, ou drapeau Kanaky selon les indépendantistes. « En additionnant nos deux légitimités, nous aurons fait un nouveau pas les uns vers les autres, et nous pourrons engager des discussions, sans arrière-pensée, pour bâtir en confiance notre avenir commun » soutient à l’époque l’élu. L’idée est reprise par le Comité des signataires le 24 juin 2010, à ce stade, dans la perspective des Jeux du Pacifique et dans l’esprit de la poignée de main entre Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou. Le Congrès émet un vœu à une large majorité en ce sens le 13 juillet suivant. Quatre jours plus tard, le Premier ministre, François Fillon, salue le lever des deux rectangles de tissu au haut-commissariat. « Depuis, selon un rapport du Sénat, les deux drapeaux flottent côte à côte sur les bâtiments publics du gouvernement, des trois provinces et des communes » à l’exception de la mairie de La Foa. Calédonie ensemble est opposé à la mesure. Pour le mouvement, l’étendard du FLNKS a une existence politique, mais pas légale, et ne contient pas aujourd’hui la part de « futur partagé entre tous ». L’opération du double drapeau est ainsi, à ses yeux, contraire à l’accord de Nouméa.

    Demain

    Au-delà de démarches passées de la formation de Philippe Gomès, le « Collectif pour un drapeau commun » milite à partir de 2010 pour l’ouverture d’un débat. Une proposition est venue s’ajouter à d’autres esquisses recensées par le passé. Une polémique est née.

    Cette problématique du nom et du drapeau du pays est extrêmement sensible, puisque le sujet renvoie à l’histoire politique du pays mais aussi, et surtout, à son devenir. Un « non » au référendum n’éteindrait nullement la question. Au contraire, les discussions doivent se poursuivre, selon les termes de l’accord de Nouméa. Une entente sereine entre tous les partis sur ce point semble toutefois difficile, pour ne pas dire impossible, si un deuxième, voire un troisième scrutin d’autodétermination se profilent. La recherche du nom et du drapeau commun aura du mal à se glisser dans le choc des projets, indépendantiste et loyaliste, chacun campant sur ses positions devant les électeurs.

     

     

    3/5

    Les signes identitaires de la Nouvelle-Calédonie doivent être adoptés à la majorité des trois cinquièmes des élus du Congrès.

     

     

    Rien de nouveau sous les drapeaux

    « Nous ne pouvons pas en rester là. » C’est ce qu’estimait Philippe Germain lors de sa déclaration de politique générale en 2015. Pour « atteindre l’inaccessible étoile : trouver un consensus sur le choix d’un drapeau et d’un nom dans le respect de la sensibilité de chacun », le nouveau président du gouvernement prévoyait qu’une « nouvelle commission, à l’instar de celle qui avait travaillé à l’adoption des trois précédents signes identitaires, soit installée ».

    Elle n’a jamais été mise en place. Faute de soutien d’autres groupes, assure-t-on chez Calédonie ensemble. Parce que le référendum est « trop proche », la question « trop épineuse », soufflent d’autres élus. Mais, sans nul doute, elle reviendra sur la table au lendemain du 4 novembre. Car l’idée « d’en rester là », ne semble partagée par personne.

    La question du 5 novembre ?

    Le « oui » propose en l’espèce une réponse claire : le pays deviendra « Kanaky-Nouvelle-Calédonie » au lendemain du vote pour l’indépendance, pose le projet du FLNKS. Un double nom en forme d’ouverture adopté par le Front après des années de militantisme pour une « Kanaky » tout court. Et ce nom sera bien entendu symbolisé par le bleu, le rouge, le vert et le cercle jaune serti de la flèche faîtière du drapeau indépendantiste. Le débat lancé lors du lever de ce drapeau aux côtés de l’étendard de la République, en 2010 a beau être plus sourd, il n’est pas éteint. Et dans le clan loyaliste, personne ne semble donner au « double drapeau », en tout cas à cette paire-là, de caractère pérenne. « Au lendemain du référendum, il nous faudra rouvrir la question du drapeau commun, écrit ainsi Philippe Gomès, pour que nous puissions enfin avoir comme signe identitaire du pays un drapeau qui nous rassemble et qui nous ressemble, flottant aux côtés du drapeau tricolore ».

     

    « Il est vain de croire que nous trouverons une solution acceptable par tous par un concours de dessin. »

     

    Reprendre l’application de l’accord, donc, mais comment ? « Il est vain de croire que nous trouverons une solution acceptable par tous par un concours de dessin », pointe Pierre Frogier qui estime que les discussions menées – ou évitées – jusqu’alors étaient « une mission impossible ». Le chef de file du Rassemblement, regrettant toujours « l’opportunité ratée » du lever du drapeau, selon lui à cause d’une « instrumentalisation extrême » d’un côté et « d’indépendantistes pas la hauteur » de l’autre, refuse de s’engager à nouveau sur la question. Pour l’instant : « Nous allons entendre ce que vont dire les électeurs, précise-t-il. C’est ça qui doit déterminer notre attitude ».

    Encore cette idée d’en reparler après l’échéance, partagée, semble-t-il par les Républicains calédoniens : « Le drapeau, qui flottera aux côtés de celui de la République, doit refléter l’identité calédonienne au sens large, pas seulement l’identité kanak qui est représentée par le drapeau du FLNKS » explique Sonia Backès. En cas de victoire du « non », la « recherche d’un drapeau en commun » aura bien lieu. Et elle risque, de nouveau, d’être houleuse.

     

     

    Repères

     

    Deux drapeaux, un seul mât Le « double drapeau » n’en est pas à son premier couac. Au Japon, ou plus récemment à Nauru, certains organisateurs se sont laissés surprendre par cette spécificité calédonienne en favorisant, dans une visite ou sur une affiche, le drapeau à la flèche faîtière plutôt que la bannière tricolore. Lors de l’épreuve de golf des derniers Minijeux du Pacifique, c’est le bleu-blanc-rouge qui avait été hissé seul, un oubli aussitôt corrigé par les Calédoniens présents. « Rien de très grave, mais c’est toujours le risque d’une polémique inutile », commente un habitué des rendez-vous régionaux. Les « règles » ne seraient-elles pas claires ? Si elles étaient à préciser, il faudrait tenir compte de la pratique : quand deux drapeaux sont hissés sur un seul mât, ils s’enroulent et s’affaissent…

    Pas facile à chanter ?

    C’est une des critiques, nombreuses, qui ont été adressées à l’hymne Soyons unis, devenons frères. Est-ce la raison pour laquelle il est si peu repris par les Calédoniens ? Pas seulement. « Personne ne le connaît, et surtout pas les élus », lâche, de dépit, Philippe Millot, directeur artistique de la chorale Mélodia, qui en est l’auteur. Pour les enfants et les adolescents qui y sont rassemblés, l’hymne a parfois été un héritage dur à porter. « Et puis on s’est dit que La Marseillaise avait pris des décennies à être appréciée par les Français », reprend le musicien, qui dénonce le manque de soutien des autorités pour le promouvoir et certains choix d’arrangements, lors de manifestations publiques, qui le rendent « impossible à chanter ».

     

    Polynésie

    L’assemblée de la Polynésie française a adopté un drapeau dès 1984. Les bandes rouges et blanches sont les couleurs traditionnelles des dynasties tahitiennes.

     

     

    Pavillon

    En mer, c’est le pavillon tricolore qu’il faut arborer pour entrer dans les eaux calédoniennes. Si de nombreux cargos font l’erreur, c’est que la Polynésie, elle, a promu son drapeau local comme pavillon de courtoisie. 

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