- Delphine Bossy | Crée le 10.10.2022 à 20h00 | Mis à jour le 10.10.2022 à 20h02ImprimerArnaud Legout installe des gouttières à 10 centimètres de profondeur. Photos Delphine BossyUn ingénieux système a été déployé à proximité de Netcha pour évaluer s’il est possible d’utiliser un compost végétal produit localement pour l’agriculture, malgré sa surcharge naturelle en métaux.
Serge a l’habitude, il sait que ce qu’il a à faire. Aux manettes de la tractopelle, il creuse une fosse à deux étages, l’un à 80 centimètres de profondeur, l’autre à 1m20, juste au pied d’un jeune kaori. Ses collègues, Bernard et Arnaud travaillent sur une autre fosse, creusée un peu plus tôt dans la matinée. Eux aussi déroulent une mécanique qui semble bien huilée. Pour chaque étage de la fosse, ils installent quatre gouttières, des sortes de rigoles en polyéthylène.
Elles ont un rôle bien précis. Elles récoltent l’eau infiltrée dans le sol à 10 et à 40 centimètres de profondeur. Celle-ci s’écoule ensuite jusqu’à quatre récipients, des seaux, disposés encore plus en profondeur, via un réseau de tuyaux.
Transfert de métaux

Serge Didier creuse une fosse à deux étages dans lesquels des gouttières seront installées.Cette eau récoltée intéresse tout particulièrement l’équipe de l’Institut agronomique néo-calédonien (IAC), menée par la chercheuse Audrey Leopold. Son analyse permettra de mesurer les éléments retenus, ou au contraire "relargués" en profondeur, par le sol, au pied du kaori. Matière organique dissoute, métaux, éléments nutritifs… l’équipe regarde tout en détail. Elle cherche notamment à vérifier si un compost végétal produit localement, naturellement chargé en métaux, peut être utilisé dans l’agriculture.

Bernard Zeller et Arnaud Legout installent le réseau de tuyaux connectés aux gouttières.Le compost en question est développé par la société Mango environnement, à la station de compostage de Karenga. Il s’agit d’un savant mélange de boues issues des stations d’épuration de Nouméa et de Dumbéa et de déchets verts collectés par la CSP. "Sur l’année, la plateforme produit 4 800 tonnes de compost, à partir de la totalité des boues des Step et de 6 000 tonnes de déchets verts", explique la chargée de mission de la Calédonienne des eaux, Meryl Bloc.
Un cercle vertueux qui assure la revalorisation de déchets, aujourd’hui impossibles à enfouir. "Ce compost est actuellement utilisé seulement en sylviculture parce qu’il dépasse les valeurs limites maximales en chrome et nickel définies par la réglementation française, le rendant impropre, au sens strict, à une utilisation en agriculture", indique la chercheuse. Mais le contexte métropolitain est différent de celui d’ici, où nos sols sont déjà très chargés en métaux. "Nous cherchons donc à vérifier si le recours à ce compost est vraiment un problème pour l’agriculture", explique la scientifique.
Une méthode déjà éprouvée

Le raccord des tuyaux est en pente pour que l’eau recueillie s’écoule jusque dans les seaux.Un apport supplémentaire de métaux, sur un sol déjà très chargé en nickel et en chrome, pourrait en effet n’avoir aucune influence, mais associé à d’autres composés présents dans le compost, il pourrait modifier l’activité microbienne du sol et accélérer la libération d’éléments métalliques. "Cela peut devenir un problème, s’il y a un risque que ces métaux libérés rejoignent une nappe d’eau souterraine, par exemple", détaille Audrey Leopold.
Pour le vérifier, l’équipe administre à de jeunes pousses de kaoris, sur une parcelle à proximité de Netcha, différentes concentrations du compost en question. Avec la méthode des gouttières, déployée sur quinze arbres, elle pourra déterminer si en la présence du compost, l’eau se charge plus en métaux, en profondeur. La méthode, dite low tech, parce qu’elle ne fait appel à aucune mécanique, a été éprouvée en France, mais aussi au Congo et en Malaisie avant d’être déployée ici.
Projet ValoPRO-NC
Le projet ValoPRO-NC, mené notamment à proximité de Netcha, par l'Institut agronomique néo-calédonien (IAC) a été financé par l'Ademe France, dans le cadre de l'appel à projet Graine, qui vise à soutenir un développement durable de la bioéconomie en réponse aux enjeux de la transition écologique autrement dit d'articuler l'accompagnement des filières de production et de valorisation de biomasses avec la réduction des impacts environnementaux et la prise en compte des services rendus par les écosystèmes.
Le dispositif de récolte de l'eau installé à proximité des jeunes kaoris à Netcha été développé par une équipe de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement, (Inrae), de l'unité biogéochimie des écosystèmes forestiers. Trois membres, Arnaud Legout, Serge Didier et le directeur de l'unité, Bernard Zeller se sont déplacés en Nouvelle-Calédonie, pour la déployer. Arrivés le 29 septembre, ils se sont mis au travail dès le lendemain matin. Ils viennent tout juste de terminer.
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