
Entretien avec... Philippe Martin, à la tête de Direction du travail, de l’emploi et de la formation (DTEF) et avec Sophie Garcia, secrétaire générale au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Philippe Martin : Aujourd’hui, il existe le chômage partiel, dit de droit commun, qui permet à des entreprises qui rencontrent des difficultés conjoncturelles ou qui sont confrontées à des circonstances exceptionnelles, de voir financer une partie du salaire de leurs employés par la Cafat. Ce montant est de 66 % du SMG (salaire minimum garanti) sur une période trois mois maximum pour un volume horaire annuel de 1 800 heures par salariés.
Sept choses à savoir sur le plan d’urgence du gouvernement face à la crise du nickel [1]
Le mécanisme de ce dispositif est le suivant : l’employeur fait une demande à la Direction du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, qui l’instruit, la valide, puis fait l’objet d’un arrêté du gouvernement. L’employeur paye le salarié sur la base de cet arrêté et se fait rembourser ensuite par la Cafat. Ce dispositif est éligible à toutes les entreprises en Nouvelle-Calédonie.
P.M : Oui. La moitié du budget actuel du chômage partiel est d’ailleurs consacré à des entreprises touchées plus ou moins directement par cette crise nickel.
P.M : En 2023, le chômage partiel a coûté 50 millions de francs. Pour 2024, nous avions une enveloppe de 100 millions qui sera consommée d’ici fin mars, début avril*. Donc on voit bien une accélération du recours à ce dispositif.
P.M : Cela montre bien qu’au-delà des entreprises directement touchées par la crise nickel, il y a des effets systémiques de cette crise. Les entreprises ne sont pas toutes directement liées aux métallurgistes, mais évidemment, de proche en proche, de sous-traitant en sous-traitant, cela se diffuse sur l’ensemble des secteurs d’activité : la restauration, l’hôtellerie, la location de biens immobiliers, etc. Sans oublier le BTP, dont la crise est plus ancienne, mais qui se focalise aujourd’hui. On voit donc bien qu’il y a une crise générale et systémique en Nouvelle-Calédonie. Le recours au chômage partiel est ainsi une solution pour amortir le choc et surtout maintenir, si possible, les compétences nécessaires dans les entreprises à une reprise future.
P.M : Elle vise le secteur des entreprises de la métallurgie et de l’ensemble des sous-traitants en relation contractuelle avec ces opérateurs. Le périmètre est donc plus restreint que le chômage partiel de droit commun.
P.M : Les sous-traitants sont aujourd’hui en première ligne des difficultés. Il faudra que ces derniers puissent indiquer qu’ils ont une baisse de leur chiffre d’affaires égale ou supérieure à 50 % par rapport aux trois derniers mois qui précèdent la demande et que cette baisse est liée à des ruptures ou à des suspensions ou à des renégociations de contrats auprès des opérateurs.
P.M : Cette allocation est également spécifique dans ce qu’elle permet d’allouer. Au lieu de 66 % du SMG sur 3 mois pour le chômage partiel, cette allocation peut aller jusqu’à 70 % de 2,5 fois le SMG, soit environ 289 000 francs par mois. Donc ce régime est plus satisfaisant, d’autant plus que les salariés qui étaient déjà au SMG percevront, eux, 100 % de leur salaire.
P.M : L’objectif est essentiellement de garder des compétences stratégiques auprès des sous-traitants pour qu’ils puissent, soit se reporter vers d’autres activités, soit maintenir leurs compétences au moment de la reprise du secteur qu’on espère tous.
P.M : Aujourd’hui, l’hypothèse de travail, ce sont environ 1 000 personnes concernées pour un montant d’un peu plus d’un milliard de francs. Évidemment tout dépendra de la durée de la crise, de si elle s’aggrave, si elle atteint un plateau ou si elle finit par se résorber.
P.M : En effet. Le coût moyen de ce dispositif par salarié est d’un million de francs sur une période de trois mois, renouvelable. Donc en fonction de l’évolution de la situation, il faudra peut-être corriger ces projections. Ce chiffre de 2 milliards correspond à l’hypothèse selon laquelle près de 2 500 salariés seraient concernés.
Sophie Garcia : Il est vrai que c’est un financement assez conséquent pour le budget de la Nouvelle-Calédonie. Pour cette enveloppe d’un milliard de francs, nous avons commencé à étudier des pistes de financement qui seront posées lors de notre budget supplémentaire. Il sera certainement voté en mai prochain. On a donc quelques solutions à l’étude et qui doivent encore être débattues par la collégialité du gouvernement, mais on pourrait trouver les financements lors de ce budget supplémentaire, avec des dégagements de ressources que l’on pourrait récupérer de ci, de là.
S.G : Oui, c’est possible car dans la délibération de cette allocation, nous avons mis en place un dispositif qui permet à la Nouvelle-Calédonie de verser une avance de trésorerie dans l’attente du vote du budget supplémentaire. Effectivement, les ressources de la Nouvelle-Calédonie ne sont pas extensibles, la trésorerie atteint aussi un niveau critique, mais puisqu’il s’agit de mesures d’urgence, nous parviendrons à dégager des ressources pour remédier aux premières demandes de ce chômage en tout cas.
* Une demande a été soumise à la Cafat (dont un conseil d’administration est prévu le 15 mars prochain) visant à obtenir un abondement de 200 millions de francs pour les crédits destinés au chômage partiel, par prélèvement sur le régime du chômage.
Par ailleurs, une sollicitation de 140 millions de francs est en cours auprès de l’Agence sanitaire et sociale (ASS-NC). Ces fonds supplémentaires sont destinés à couvrir les besoins sur une période de deux à trois mois.
Links
[1] https://www.lnc.nc/article/nouvelle-caledonie/politique/mines/economie/sept-choses-a-savoir-sur-le-plan-d-urgence-du-gouvernement-face-a-la-crise-du-nickel
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