- Baptiste Gouret | Crée le 16.04.2025 à 16h11 | Mis à jour le 17.04.2025 à 10h25ImprimerHervé Mariton, ancien député et président de la Fédération des entreprises des Outre-mer, a animé un séminaire, ce mercredi 16 avril, à l’amphithéâtre de la CCI relatif aux enjeux du financement privé en Nouvelle-Calédonie, près d’un an après les émeutes. Photo Baptiste GouretÀ la tête de la Fédération des entreprises des outre-mer (Fedom), Hervé Mariton a animé un séminaire ce mercredi 16 avril dédié aux enjeux du financement des entreprises calédoniennes, dans un contexte toujours marqué par les émeutes. En attendant un rétablissement de la confiance et de l’attractivité de la Nouvelle-Calédonie, très dépendantes d’un compromis politique encore incertain, l’ancien député milite pour avancer sur une "étape intermédiaire" pour permettre aux entreprises de tenir le coup. Entretien.
Vous avez animé ce mercredi matin un séminaire de la Fédération des entreprises des outre-mer (Fedom) à l’amphithéâtre de la CCI, en présence de nombreux chefs d’entreprise et d'acteurs économiques. Qu’en est-il ressorti ?
Ce fut une matinée d’échanges qui rappelle que la crise économique, après les événements de l’an dernier, est longue, douloureuse et entraîne un manque de visibilité. D’un autre côté, les chefs d’entreprise montrent des envies d’entreprendre. Mais cela est conditionné à un retour de la confiance et à une reconstruction de l’attractivité de la Nouvelle Calédonie. On est dans un contexte où il y a des discussions politiques et, on le sait, l’avenir politique et l’avenir économique de la Calédonie sont liés.
Pour autant, on ne peut pas avoir un regard uniquement tourné vers le long terme, aussi important soit-il. Ce que je retiens des rencontres que j’ai effectuées depuis une semaine en Nouvelle Calédonie et des travaux de ce matin, c’est qu’il est important d’avancer sur une étape intermédiaire pour la reconstruction économique de la Nouvelle Calédonie. Il y a vraiment, pour l’année 2025, des solutions à trouver dans l’immédiat pour que l’accès au crédit se fasse de manière moins coûteuse qu’aujourd’hui, pour réduir la difficulté d’accès aux assurances et qu’elles soient plus réactives, pour que les dispositifs d’aide fiscale à l’investissement soient plus opérationnels…
Il faut que l’accès à l’assurance soit simplifié et moins cher
J’ai reçu, ce matin même, un courrier de la ministre des Comptes publics qui m’indiquait qu’il allait désormais être possible, dans le domaine du commerce, de bénéficier d’une aide fiscale importante à la reconstruction et à la réhabilitation lourde. Mais tout ça est conditionné par le budget 2026 de l’État. C’est trop loin. Donc il faut absolument qu’on marque des étapes intermédiaires. Avoir foi dans la reconstruction à long terme est très bien, mais la confiance, ça se construit pas à pas. Vous ne pouvez pas dire : "j’ai confiance dans ce que sera la situation en 2030." A la Fédération des entreprises des outre-mer, avec nos organisations locales, avec les élus aussi qui partagent notre travail, nous allons œuvrer à construire cette étape intermédiaire.
De quelle manière, concrètement ?
Nous travaillons activement à la question de l’assurance des entreprises. Parce que c’est trop compliqué et très coûteux, aujourd’hui, d’être assuré. Or, si on veut investir et bénéficier de financements bancaires, il faut que l’accès à l’assurance soit simplifié et moins cher. Il y a un outil qui existe, qui s’appelle la Sogefom [un fonds de garantie pour des crédits bancaires accordés aux TPE et PME NDLR], mais dont les prêts sont aujourd’hui trop coûteux. Nous allons travailler avec le gouvernement pour les rendre plus attractifs.
Construire le système parfait demandera du temps et, compte tenu de l’intensité de la crise, nous ne l’avons pas en Nouvelle-Calédonie. Donc il faut construire un schéma transitoire. Il y a des mesures à prendre sur le plan réglementaire, mais aussi législatif. L’engagement que m’a envoyé la ministre des Comptes publics concernant l’aide fiscale à la réhabilitation des commerces devra par exemple être suivi d’une mesure législative. On va travailler à ce que soit le cas avant la fin de l’année.
Vous avez parlé tout à l’heure de confiance, d’attractivité de la Nouvelle-Calédonie. Pourquoi est-ce si important ?
Les chefs d’entreprise ont tous dit qu’il y avait un problème de confiance. Soit on capitule, et à ce moment-là on rentre tous chez soi, soit on regarde l’avenir. L’avenir, ça s’appelle l’attractivité. Le territoire ne va pas rebondir et se développer juste parce que les gens auront envie de vous être sympathiques. Ils le feront s’il y a un certain nombre d’arguments en face. C’est le travail du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, en termes de réflexion sur la fiscalité et l’attractivité du territoire. C’est aussi, je crois, le besoin d’un certain nombre de dispositions sur le plan national, parce que l’État veut et doit participer.
Il n’y a pas d’avenir politique possible sur un champ de ruines économique
Le rebond de la Nouvelle-Calédonie ne se fera pas en se renfermant et en regardant tristement la baisse démographique telle qu’on l’a constaté ces derniers mois. C’est en faisant en sorte qu’il y ait des sujets d’optimisme, d’avenir et qu’il y ait matière à développement dans les activités traditionnelles de la Nouvelle-Calédonie, telles que la mine et la métallurgie, mais aussi le développement de nouvelles activités.
Comment fait-on pour restaurer la confiance et relancer l’économie dans un contexte politique si instable ?
La confiance est effectivement très dépendante du politique, mais pas exclusivement. Certes, les discussions institutionnelles sont importantes pour l’économie, car il n’y a pas d’avenir politique possible sur un champ de ruines économique et il n’y a pas d’avenir économique sans une visibilité politique. Une fois qu’on a dit ça, est-ce qu’il y aura un accord ou pas ? Qu’est-ce qu’il y aura dans l’accord ? Quel temps cela va prendre ? Nous ne le savons pas. Sauf que, en attendant, les chefs d’entreprise ne peuvent pas se permettre de rester les bras croisés. Il faut payer les salaires, investir, aller voir son banquier, construire ou reconstruire après les destructions de l’an dernier. C’est la raison pour laquelle je plaide pour l’existence d’une étape intermédiaire. Car même si un accord politique était conclu rapidement, il n’établira pas immédiatement un calendrier de relance économique.
Le temps c’est de l’argent. On a besoin de reconstruire, on a besoin de répondre aux problématiques d’emploi. Tout cela peut s’intégrer dans ce cadre intermédiaire sur lequel nous souhaitons travailler dans les prochaines semaines.
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