- Sabine COLPART / AFP | Crée le 23.06.2024 à 09h01 | Mis à jour le 23.06.2024 à 09h16ImprimerSelon son avocat Me Pierre Ortent, le chef de file de la CCAT Christian Téin doit être incarcéré à Mulhouse. Photo Anthony TejeroPlusieurs militants indépendantistes, dont Christian Téin, le chef de la CCAT, soupçonnés d’avoir orchestré les émeutes sur le "Caillou", vont être placés en détention provisoire en Métropole, ont annoncé samedi leurs avocats.
Christian Téin sera incarcéré à Mulhouse, Brenda Wanabo à Dijon, Frédérique Muliava à Riom… Plusieurs militants indépendantistes vont être envoyés en détention provisoire dans l’Hexagone. Ces décisions ont été prises par un juge des libertés et de la détention (JLD), appelé à se prononcer sur le sort des 11 personnes interpellées mercredi, dont M. Téin, considéré comme le dirigeant de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT).
Le procureur Yves Dupas a confirmé à l’AFP des "affectations en Métropole", sans plus de précision à l’issue de ces comparutions à huis clos devant le JLD à Nouméa.
Les chefs de mise en examen n’ont pas été précisés. L’enquête vise notamment des faits d’association de malfaiteurs, vols avec armes en bande organisée, complicité par instigation de meurtres ou tentatives de meurtre sur personnes dépositaires de l’autorité publique.
Procédures "exceptionnelles"
M. Téin doit être incarcéré à Mulhouse (Haut-Rhin) selon son conseil, Me Pierre Ortent, qui a fait part de sa "stupeur". "Personne ne détenait l’information au préalable que la destination serait la Métropole. Ce sont des procédures parfaitement exceptionnelles par rapport au territoire", a-t-il insisté, ajoutant ne "pas avoir d’informations quant à la date exacte du transfert" dans l’Hexagone.
Une autre mise en cause, Brenda Wanabo, chargée de la communication de la CCAT, doit être placée en détention à Dijon, selon son avocat, Me Thomas Gruet, qui s’est dit "extrêmement choqué et abasourdi".
Mère de trois enfants, dont le plus jeune a 4 ans, cette militante "qui n’a jamais appelé à la violence", va être séparée de sa famille et est "anéantie", a-t-il souligné. Pour Me Gruet, "toutes les erreurs dans la gestion de la crise ont été commises de la part de l’institution judiciaire", qui a "répondu à des considérations uniquement politiques".
Quant à Frédérique Muliava, directrice de cabinet du président du Congrès de Nouvelle-Calédonie Roch Wamytan, elle doit être incarcérée à Riom, près de Clermont-Ferrand, selon son avocate, Me Christelle Affoué, qui dénonce "une décision parfaitement choquante et éprouvante".
"Martyrs de la cause"
"S’il s’agissait d’en faire des martyrs de la cause indépendantiste, on ne s’y prendrait pas autrement", a commenté Me Stéphane Bonomo, avocat d’un autre mis en cause, Gilles Joredie. Joël Tjibaou, un des fils de Jean-Marie Tjibaou, président du FLNKS assassiné en 1989, sera lui fixé sur son sort mardi au plus tard, a indiqué son avocate Me Claire Ghiani. En attendant, il a été placé en détention à Nouméa.
Arrivés au palais de justice de Nouméa samedi peu avant 7 heures, les 11 interpellés ont pu, pour certains d’entre eux, apercevoir quelques instants leurs proches venus les soutenir. La femme de Christian Tein a éclaté en sanglots après avoir pu embrasser son mari, a constaté une journaliste de l’AFP. L’avocat de Brenda Wanabo est revenu peu avant minuit avec une grande valise rose contenant quelques affaires pour sa cliente, avant son départ en Métropole.
Ces décisions interviennent six semaines après le début des violences qui agitent le Caillou, les plus graves depuis celles des années 1980. Nourries par le vote d’un projet de loi constitutionnel visant à élargir le corps électoral pour le scrutin provincial prévu fin 2024, ces émeutes ont fait neuf morts, dont deux gendarmes, des centaines de blessés et des dégâts considérables, d’un coût estimé à 1,5 milliard d’euros, selon le dernier bilan.
Le projet de loi ayant mis le feu aux poudres a cependant été "suspendu" le 12 juin par Emmanuel Macron, dans la foulée de la dissolution de l’Assemblée nationale.
Dans une lettre aux Calédoniens publiée mardi, M. Macron a exigé "la levée ferme et définitive de tous les barrages" dans l’archipel et "la condamnation des violences sans faux-semblants". La situation "demeure inadmissible et ceux qui l’ont encouragée devront répondre de leurs actes", avait insisté le chef de l’Etat, qui s’était rendu sur place le 23 mai pour une visite express.
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