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    Nouvelle Calédonie
  • Anne-Claire Pophillat | Crée le 20.02.2025 à 15h41 | Mis à jour le 26.03.2025 à 15h53
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    Alcide Ponga a prononcé un discours sur l’action du gouvernement à venir qu’il souhaite "pragmatique". Photo A.-C.P.
    Le président du 18e gouvernement s’est prêté au jeu de la déclaration de politique générale (DPG), ce jeudi matin 20 février, au Congrès, devant les élus et les représentants des institutions. Au cœur de l’action à venir de l’exécutif ? L’assainissement des finances publiques. Une "opération de sauvetage" qui nécessitera des économies "drastiques". Mais peu d’annonces concrètes et une impasse sur les sujets d’inquiétude actuels.

    Le constat : une "crise grave"

    "Jamais nous n’avons connu une crise aussi grave, ni un avenir aussi incertain", déclare, en préambule de sa déclaration de politique générale, Alcide Ponga, ce jeudi matin, au Congrès, rappelant la période difficile que traverse le pays. L’économie est "à terre", les finances publiques sont "exsangues", et la confiance entre les citoyens "brisée". Et même si le temps est court, il s’agit "d’une période cruciale". Le gouvernement pose son ambition : "tout mettre en œuvre pour sauver la Nouvelle-Calédonie" et "raviver une aspiration commune". Un programme ambitieux pour les quelques mois dont dispose l’exécutif, jusqu’aux élections provinciales prévues en novembre.

    Une situation financière dans le rouge

    Le 18e gouvernement assure qu’il n’y aura pas d’augmentation de la fiscalité, mais compte bien mettre le service public à la diète. Car la situation financière s’est largement aggravée. "Notre capacité d’épargne, indispensable au financement de nos investissements, n’a cessé de diminuer depuis 2016" et "la TGC n’a pas généré les recettes attendues", indique le président. La collectivité manque de trésorerie, le fonds de roulement est réduit à peau de chagrin, et le niveau d’endettement propre "atteint des sommets, avoisinant les 317 %". Ce qui contraint l’exécutif, en vue de l’élaboration du budget 2025, d’afficher une "maîtrise rigoureuse des dépenses".

    La priorité : assainir les finances publiques

    L’essentiel est donc bien "d’assainir" et de "redresser les finances publiques", de renforcer l’efficacité des administrations et de moderniser et optimiser l’action publique. Mais cet effort, souligne Alcide Ponga, "doit être partagé par tous". "Les sacrifices doivent être équitablement répartis pour reconstruire ensemble". La méthode est connue : mutualiser les moyens, maîtriser la masse salariale, rechercher les économies d’échelle, réduire les dépenses et les coûts de fonctionnement en diminuant le nombre de directions et d’établissements publics, ce qui devrait abaisser le nombre d’agents publics.

    Parmi les rares annonces, le président a évoqué le partage des outils et infrastructures dans le cadre de la formation, qui pourrait se concrétiser par la création d’un “village des solutions”, un lieu rassemblant des guichets offrant un accès simplifié aux bénéficiaires.

    Cela ne sera pas une mince affaire. Il y aura de la casse, prévient Alcide Ponga. "C’est une opération de sauvetage qu’il faut mener. Ce gouvernement mettra en œuvre des diminutions drastiques, voire supprimera certaines actions". Cela devrait se traduire par la révision de certains dispositifs d’aide et d’accompagnement, une réforme des critères d’attribution des subventions.

    Autre enjeu : le rééquilibrage du système de santé, un serpent de mer. Alcide Ponga a parlé d’une réforme qui serait "mise en œuvre rapidement", s’inspirant du plan Do Kamo voté par le Congrès… début 2016. D’autres mesures discutées depuis plusieurs années ont été mentionnées, comme un numéro unique d’assuré social, une feuille de soins électronique, et une volonté de davantage responsabiliser les bénéficiaires.


    Le président du 18e gouvernement s’est exprimé devant les élus du Congrès et les représentants officiels des collectivités, consulats, forces de l’ordre, haut-commissariat, etc. Photo A.-C.P.

    Un plan de relance

    Avec, comme maître mot, "le pragmatisme", le 18e gouvernement se veut dans l’action, au-delà de toute "idéologie" et "doctrine". La relève des secteurs de la mine et du nickel est présentée comme une urgence. Alcide Ponga imagine, avec le soutien de l’État, un travail sur le prix de l’énergie à court terme et une réflexion autour des énergies renouvelables pour améliorer la compétitivité en réduisant l’impact environnemental. Une réflexion engagée du temps de l’ancien ministre de l’Économie Bruno Le Maire, qui avait mené à l’échec du pacte nickel, rejeté par les élus du Congrès.

    Un autre point concerne les transports. Le président propose la refonte du réseau de transports publics routier et sa gestion, ainsi qu’une réflexion sur le transport scolaire à l’échelle du territoire. Mais l’accent sera mis sur la stabilisation de l’offre de transport passagers aérien et maritime, avec le projet de rapprochement des activités d’Air Calédonie à l’aéroport de La Tontouta et une collaboration plus étroite avec Aircalin. Le modèle maritime, lui, "est à bout de souffle" et doit être développé.

    Une autre partie importante concerne la réalisation de grands travaux pour entraîner la relance de l’économie, avec l’élaboration d’un Plan pluriannuel d’investissement multi-collectivités. Afin de stimuler l’attractivité, le gouvernement envisage de proposer au Congrès des mesures d’incitations "dans les meilleurs délais", mais sans en préciser la nature. Pour les entreprises, il s’agira de simplification administrative et réglementaire, de dématérialisation, de faciliter la création de société.

    Alcide Ponga a également rapidement passé en revue l’ensemble des secteurs. Sport, éducation, environnement, culture – le gouvernement assure qu’il travaillera à sauvegarder les structures en difficulté -, agriculture et souveraineté alimentaire, tourisme, économie bleue et renforcement de la coopération régionale. Un paragraphe a également été consacré à la santé. Face à la pénurie de soignants, une campagne de remobilisation de la réserve sanitaire calédonienne a été lancée, des mesures sont étudiées pour réorganiser l’offre de soins, développer la télémédecine, établir un partenariat public-privé et refondre la carte sanitaire.

    Des oublis

    L’impasse a été faite sur certains dossiers importants du moment. Quid de l’aide de l’État à venir et de sa ventilation, du chômage partiel, de la question des assurances – sujet réglé en une seule phrase : "le gouvernement sollicite le soutien de l’État afin de trouver des solutions aux problématiques rencontrées par les entreprises" – des grands chantiers, alors que le secteur du BTP attend depuis des semaines la liste des établissements publics retenus pour être reconstruits ? Malgré un appel à se mettre au travail, à reconstruire et à "imaginer un modèle sociétal renouvelé, inclusif et durable", Alcide Ponga peine à fédérer autour d’un discours qui verse trop dans la généralité en écartant ce qui préoccupe le plus les Calédoniens, à savoir l’emploi, le chômage, le coût de la vie, la santé.

    Et aussi…

    Alcide Ponga souhaite que le gouvernement se penche sur l’encadrement et la limitation de la publicité des produits trop gras, sucrés et salés qui "nuisent à la santé, surtout chez les jeunes". Et prévient que des "actions ciblées" viseront à réduire la consommation de sucre. L’objectif général étant "d’améliorer durablement les habitudes alimentaires".

    Parmi les autres sujets cités, le logement, avec une annonce concernant une réforme à venir de l’aide au logement ainsi que la création d’un fonds dédié au renouvellement urbain et au logement. Ainsi que les relations avec les instances coutumières. "En 2025, une délibération cadre redéfinira les bases et les modalités d’intervention des institutions coutumières, favorisant une meilleure articulation avec les collectivités territoriales", appuie Alcide Ponga. Une façon de "traduire certaines orientations de la charte du peuple kanak".

    Enfin, le président a évoqué "la réduction des emballages plastiques pour favoriser une alternative écologique". Il faudra alors revenir sur une décision du 17e gouvernement en octobre 2024, qui proposait de reporter l’interdiction des barquettes plastiques initialement prévue en 2022 à… 2040. Le précédent exécutif jugeait "cette mesure ambitieuse prématurée".

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