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    Nouvelle Calédonie
  • Anthony Tejero | Crée le 22.02.2025 à 13h53 | Mis à jour le 26.03.2025 à 15h38
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    À l’issue des honneurs militaires rendus à la Croix de Lorraine, Manuel Valls a tenu à rencontrer les Calédoniens mobilisés avec qui les échanges ont été parfois musclés. Et ce, pendant une dizaine de minutes. Photo Anthony Tejero
    Alors que Manuel Valls est arrivé ce samedi matin en Nouvelle-Calédonie, quelques centaines de Calédoniens ont répondu à l’appel des loyalistes pour assister à la première séquence du ministre des Outre-mer, à la Croix de Lorraine. Une manière de démontrer leur "attachement viscéral à la France" et le besoin d’une "position claire" sur l’avenir institutionnel. Le ministre d’État, qui est allé à leur rencontre et qui a eu des échanges parfois musclés avec eux, a assuré que le lien de l'Hexagone avec le Caillou reste "fort", mais qu’il faut "poursuivre le dialogue". Reportage.

    Une myriade de drapeaux tricolores qui flottent au vent, la Marseillaise scandée en cœur par la foule… Une telle scène ne s’était plus produite depuis les émeutes. En dépit de l’interdiction des rassemblements publics dans le Grand Nouméa, toujours en vigueur, plusieurs centaines de Calédoniens (500 selon les forces de l'ordre) ont tenu à faire le déplacement, ce samedi matin, au Mont-Coffyn, pour répondre à l’appel du camp loyaliste afin de donner le ton, dès l’arrivée du ministre Manuel Valls, qui entame une visite d’une semaine jusqu’à vendredi prochain sur le Caillou.


    Ces militants ont notamment tenu à rappeler au ministre leur attachement au dégel du corps électoral. Photo Anthony Tejero

    Parmi ces farouches partisans du maintien de la France, Christelle, 54 ans, n’est pas des plus optimistes. "Je pense qu’il n’y aura pas d’accord. Je suis réaliste. On peut discuter de beaucoup de choses, mais il y a des concessions sur lesquelles on ne peut pas revenir : le dégel du corps électoral, la Calédonie française… liste cette Nouméenne. Je m’interroge sur le respect de la démocratie sur ce territoire atypique. On ne peut pas céder à la violence. Il faut discuter avec les indépendantistes, mais pas avec les terroristes."

    Venu de Tontouta, Romain non plus "n’attend pas grand-chose" de cette "énième" visite ministérielle. Pourtant, ce quadragénaire voulait absolument faire son devoir "patriotique" et montrer, d’emblée, à Manuel Valls, que "les partisans de la France sont bien là" et comptent peser dans les négociations à venir. "On en a ras le bol de cette France qui est forte avec les faibles, c’est-à-dire les loyalistes qui respectent les règles, et faible avec ceux qui adoptent des positions dures. On veut interpeller le ministre pour qu’il équilibre son regard et tienne vraiment compte des deux sensibilités de ce pays."

    "On ne veut plus d’ambiguïté"

    Même son de cloche pour Agnès et Nathalie venues défendre "leur attachement viscéral à la France". "Il n’y a pas d’autres solutions. Il y a eu trois référendums. On est là parce qu’on veut que notre vote soit reconnu comme celui de n’importe quel autre citoyen français, insistent ces salariées du secteur paramédical. On voit à quel point le système de santé s’est dégradé, c’est pourquoi il faut un accord pour redonner des perspectives. Désormais, il faut arrêter les discussions bilatérales et passer aux trilatérales et prendre des décisions fermes. Nous avons besoin de clarté, on ne veut plus d’ambiguïté."


    Avant les hommages militaires, Manuel Valls a été accueilli par les responsables politiques des institutions dont Alcide Ponga, président du gouvernement. Photo Anthony Tejero

    Ce terme d’ambiguïté revient dans la plupart des discours des Calédoniens présents. "J’attends du ministre qu’il arrête avec ça et que la France ne recule plus devant la violence. Il faut une position claire maintenant, lance Jeff, jeune Caldoche originaire de Ouégoa. Je suis là aujourd’hui pour rappeler que les trois référendums n’ont pas été organisés pour rien, mais aussi pour inciter davantage la jeunesse à se mobiliser, essayer d’enclencher une dynamique car beaucoup de mes proches ont les mêmes opinions que moi, mais ne veulent pas se mouiller et les assumer en public."

    Vifs échanges avec le ministre

    Des positions que les participants n’ont pas hésité à crier à Manuel Valls, dès son arrivée à la Croix de Lorraine, où le ministre a été accueilli par un slogan répété en boucle "Non, c’est non". A l’issue des hommages militaires, le chef des Outre-mer, parti à la rencontre de ces Calédoniens, n’a pas eu en retour que des sourires, vivement chahuté par certains qui n’ont caché ni leur peur, ni leur colère.


    Ces Calédoniens ont notamment rappelé au ministre à quel point "ils ont souffert" lors des longs mois de violence qu’a traversé le pays l’an dernier. Photo Anthony Tejero

    "Je suis venu dire que la France est toujours là. Et que le lien avec la Calédonie est fort. Il est d’autant plus important que je vais de nouveau annoncer des mesures importantes pour soutenir l’économie qui est par terre, pour soutenir les entreprises et les chômeurs, assure Manuel Valls, concluant sur le deuxième enjeu de sa visite : "renouer et poursuivre le dialogue parce que sans dialogue, il n’y a pas d’avenir non plus."

    Sonia Backès : "Cet accueil est une façon de réaffirmer la démocratie"


    À l’issue de cette séquence, Sonia Backès a salué la mobilisation de ces militants pour cet "accueil républicain" réservé à Manuel Valls.

    "Les Calédoniens présents sont là pour affirmer leur volonté que les trois référendums soient respectés. Ils ne veulent pas se faire imposer une solution qu’ils n’ont pas choisie. Cet accueil était simplement une façon de réaffirmer la démocratie, respectueusement, calmement", commente la présidente de la province Sud, qui comprend la colère et les craintes dont ont fait part certains Calédoniens au ministre. "On a voté trois fois non. On s’est fait tout casser le 13 mai. On s’est fait atteindre dans notre chair, dans notre quotidien. Ça a cassé l’idée qu’on se faisait du destin commun. On se rend compte qu’aujourd’hui on a potentiellement un ministre qui va écouter plus ceux qui ont cassé que ceux qui n’ont pas cassé. Je pense que la colère vient de là, il faut la comprendre, il faut l’entendre. Je pense qu’il faut que le ministre réaffirme très clairement qu’il condamne ce qui s’est passé, qu’il respecte les résultats des trois référendums. On trouvera alors une solution sur cette base."

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