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    Politique
  • A.T. | Crée le 14.12.2023 à 07h05 | Mis à jour le 14.12.2023 à 08h39
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    Vue aérienne des quartiers de Koutio et de Dumbéa-sur-Mer et de son urbanisation galopante. Photo Anthony Tejero
    Le dernier rapport de l’observatoire des communes vient de sortir. Si les finances des collectivités calédoniennes restent "relativement favorables" par rapport au reste de l’outre-mer, leur situation s’est détériorée, notamment en raison d’un recul de l’épargne censée financer les investissements. Dans le détail, les communes de l’agglomération (hors Nouméa) connaissent davantage de difficultés que les petites communes de moins de 10 000 habitants.

    Une situation "favorable", mais qui n’est plus "privilégiée"

    Les communes calédoniennes conservent un taux d’épargne globalement supérieur à la moyenne des autres communes d’outre-mer. Cette différence s’explique par la faiblesse du poids des dépenses de personnels en Nouvelle-Calédonie, qui s’établit à 43 % des dépenses de fonctionnement (contre 59 à 68 % dans les départements ultramarins). Pour autant, la situation financière des collectivités du Caillou "n’apparaît plus si privilégiée", avertit le rapport.

    En effet, malgré la sortie de la pandémie, et un certain rebond économique en 2022 dans le pays, les communes n’ont généralement pas vu leur situation financière s’améliorer.

    Une hausse des recettes de fonctionnement

    La capacité des communes à dégager de l’épargne sur leur section de fonctionnement reste déterminante afin de relever les défis financiers croissants : autofinancer les investissements, rembourser leur dette, assurer un service public de qualité, etc.

    Or au chapitre des bonnes nouvelles, les recettes de fonctionnement ont progressé de +3,7 % (par rapport à 2021), une hausse jugée "remarquable" qui correspond à un total de 51,1 milliards de francs (contre 50,2 milliards en 2021).

    Des dépenses de fonctionnement en forte augmentation

    En revanche, sous l’effet d’une inflation accrue, les dépenses de fonctionnement des communes calédoniennes se sont élles aussi envolées, s'élevant à 42,6 milliards de francs, soit une hausse significative de +3,4 % par rapport à 2021.

    Une progression néanmoins moins marquée que dans les autres collectivités ultramarines (+6,8 %). "Ce n’est donc pas le signe d’un dérapage des dépenses de la part des communes, mais plutôt le signe d’une inflation subie", analyse Arnaud Lataste, pour l’AFD.

    Un taux d’épargne en net repli

    C’est "l’élément fondamental" de la santé financière des collectivités afin qu’elles puissent maintenir leur niveau d’investissement. Or les nouvelles ne sont pas bonnes de ce côté-là. Le taux d’épargne des communes du Caillou est en "net repli", passant de 9 à 8,4 milliards de francs, soit une baisse de -5,7 %.

    "Cette diminution est un signal fort car elle reflète une pression financière croissante sur les budgets des communes […] et peut avoir des implications sur leur capacité à financer de nouveaux projets ou encore à rembourser leur dette", alerte le rapport, qui rappelle que ce taux d’épargne se détériore "d’année en année". En 2022, il a ainsi atteint son plus bas niveau, soit 16,6 % (chiffre qui reste néanmoins au-dessus du seuil minimal de 15 % préconisé par l’AFD).

    Si l’épargne des communes calédoniennes demeure comparable aux communes métropolitaines et nettement supérieures aux autres collectivités d’outre-mer, ce "décrochage" annonce la perte progressive d’une "situation privilégiée".

    Le Grand Nouméa plus en difficulté

    À l’exception de Nouméa, ville qui perçoit davantage de taxes et d’impôts, l’ensemble des communes du Caillou voient leur taux d’épargne reculer. En revanche, la situation diffère et il existe "de fortes disparités" en fonction de la taille des communes. Ainsi ce phénomène frappe davantage les grandes communes (qui comptent plus de 10 000 habitants), à savoir Dumbéa, Païta et le Mont-Dore. Leur niveau d’épargne a dégringolé et s’établit désormais autour de 11 %, contre encore 20 % pour les communes de moins de 10 000 habitants.

    Et l’observatoire avance les raisons de tels écarts : les communes de l’agglomération "sont majoritairement concernées par une croissance démographique soutenue qui entraîne des besoins accrus en matière de développement des services et des infrastructures publiques". Et de conclure : "ce constat n’est pas nouveau, mais la fragilité de la situation financière de ces communes semble encore s’accentuer pour devenir très préoccupantes".

    "Il y a des incertitudes sur la capacité des communes à être des moteurs de l’investissement"


    Damien Roiné, coauteur de ce nouveau rapport, est chargé de mission à l’AFD.

    Entretien avec Damien Roiné, chargé de mission à l’AFD (Agence française de développement)

    Qu’est-ce que ce rapport ?

    L’observatoire des communes est une publication réalisée chaque année par l’AFD depuis huit ans. C’est un outil d’aide à la décision pour les mairies. Nous compilons, analysons et restituons les données financières des différentes communes, ce qui leur permet d’avoir des éléments de comparaison entre elles et avec éventuellement le reste de l’outre-mer et de la Métropole afin de se projeter dans l’avenir. Là, nous avons plus particulièrement analysé l’année 2022.

    Les élus évoquent de plus en plus des dotations en baisse et des budgets davantage restreints. Est-ce que cela se vérifie dans ce rapport ?

    Les finances des communes reposent beaucoup sur les dotations venant de l’État et venant de la fiscalité calédonienne. Depuis une décennie, la fiscalité n’évolue pas, donc les communes ont des recettes peu dynamiques. Elles ont aussi assez peu d’autonomie financière pour leur permettre d’avoir de nouvelles recettes.

    En 2022, on constate qu’une ressource clé, à savoir l’épargne, est en recul. Et les dépenses de fonctionnement repartent, elles, à la hausse après une période Covid plutôt marquée par un ralentissement. En parallèle, 2022 a été également marquée par le retour de l’inflation, ce qui explique en partie l’augmentation des dépenses et le recul de l’épargne.

    Y a-t-il des spécificités géographiques entre la Brousse, les îles et l’agglomération ?

    Nous ne pointons pas des communes en particulier dans l’observatoire. En revanche, nous les séparons en fonction de leur taille, notamment celles de moins ou plus de 10 000 habitants, en isolant également Nouméa, qui a sa trajectoire propre.

    Globalement, les communes de moins de 10 000 habitants ont aussi des tensions sur leur épargne mais conservent un niveau plus important que les communes de plus de 10 000 habitants (hors Nouméa). Pour ces dernières, nous constatons une épargne en baisse, avec un poids de la dette, qui est le plus important des communes de Nouvelle-Calédonie. Il y a donc des variations assez marquées entre ces deux catégories. Avec des interrogations sur l’avenir puisque si on a peu d’autofinancement, si on est déjà endetté, cela peut être difficile d’être le moteur de l’investissement comme ces communes ont pu l’être auparavant.

    Peut-on rappeler concrètement ce que sont les investissements d’une commune ?

    Les communes ont réalisé 15 milliards de francs d’investissement en 2022, ce qui est un peu mieux que les années précédentes, bien que nous restions en deçà de la mandature précédente (soit avant 2020). Les investissements portent sur l’aménagement des routes, la construction de conduites d’eau potable, les travaux d’assainissement, les écoles, les rénovations, etc. Par ailleurs, les communes subissent de plus en plus les effets du réchauffement climatique avec des glissements de terrain, des facteurs nouveaux à prendre en compte, etc. Elles s’investissent également dans la transition énergétique comme l’installation de panneaux solaires.

    Est-ce que l’AFD émet des préconisations ?

    Ce n’est pas notre rôle. L’observatoire pose un diagnostic, que nous espérons le plus précis et utile afin que les autorités et associations de maire s’en emparent pour porter leurs projets. Les communes jouent aujourd’hui un rôle central dans leur investissement au quotidien, le lien social qu’elles créent, etc. Ce sont des acteurs de proximité.

    Quelles tendances se dégagent de 2023 ?

    L’année 2022 s’est terminée avec des incertitudes sur la capacité des communes à être des moteurs de l’investissement. 2023 semble indiquer qu’il n’y a toujours pas d’accélération des investissements. En tout cas, en ce qui concerne le recours à l’emprunt, 2023 n’est pas une année massive. Il faut souligner que nous sommes dans une période de taux très élevé, avec un taux Euribor qui était encore négatif il n’y a pas très longtemps, et qui est aujourd’hui au-dessus de 3 %, voire 4 %. C’est un des facteurs qui peut limiter la capacité d’investissement des communes.

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