Dans le cadre de la 15e conférence mondiale sur la biodiversité (COP 15) qui se tient actuellement à Montréal, l’Union internationale de conservation de la nature (UICN) a actualisé sa liste rouge des espèces menacées. Jusqu’alors espèce classée "vulnérable", les dugongs de Nouvelle-Calédonie viennent d’être déclarés "en danger". Un véritable signal d’alerte sur le risque élevé de leur extinction.

Isolement et activités humaines en cause

Dans nos eaux calédoniennes, on répertorie aujourd’hui moins de 900 dugongs adultes. "Ce chiffre pourrait même être plus bas, autour de 700", alerte Marc Oremus, responsable du WWF-France en Nouvelle-Calédonie et co-auteur de l’évaluation UICN. "Alors qu’au début des années 2000, on estimait les populations de dugong entre 1500 et 2000 individus."

Selon les chercheurs, ce déclin s’explique d’une part, par l’isolement géographique et génétique des dugongs. "Suite aux multiples échantillons récoltés, les dugongs calédoniens sont isolés des populations voisines et présentent le plus faible niveau de diversité génétique à l’échelle mondiale", précise Marc Oremus. Dans le viseur également, les activités humaines, telles que le braconnage, les collisions avec les bateaux ou encore les prises accidentelles dans les filets de pêche, participent activement à la hausse de mortalité des dugongs.

20 ans d’études sur les dugongs de Nouvelle-Calédonie

Ce nouveau classement "en danger" s’appuie sur des études scientifiques menées sur les dugongs de Nouvelle-Calédonie initiées dès 2003 par l’association Opération Cétacés. Des études poursuivies pendant deux décennies avec WWF et l’IRD en collaboration avec les membres du Plan d’Actions Dugong (PAD) et les universités australiennes de James Cook et de Murdoch. "Le dugong est un animal qui vit longtemps, c’est pourquoi l’investissement de nombreux partenaires et des années d’effort ont été nécessaires pour acquérir les connaissances scientifiques indispensables à l’évaluation de son état de santé", explique Claire Garrigue, chargée de recherche à l’IRD dans l’UMR Entropie et co-autrice de l’évaluation UICN.

"Un trésor calédonien"

Pour ne pas voir disparaître l’un de nos emblèmes calédoniens, l’heure est à la responsabilisation et à l’action selon Marc Oremus. "Une remobilisation à 200 % est nécessaire de tous les acteurs concernés pour mettre en place des moyens de protection et de surveillance", explique-t-il. "Les Calédoniens et Calédoniennes peuvent aussi bouger les lignes en se réappropriant culturellement ce trésor calédonien et en prenant conscience que nous sommes l’une des dernières régions du monde à abriter une espèce aussi fascinante que le dugong." A l’échelle mondiale, le dugong est considéré comme éteint en Chine et on compte moins de 250 individus en Afrique de l’Est.

Pour rappel, la Liste rouge de l’UICN comprend désormais 150 388 espèces, dont 42 108 menacées d’extinction. Plus de 1 550 des 17 903 espèces d’animaux et végétaux marins évaluées sont menacées d’extinction, les changements climatiques ayant un impact sur au moins 41 % des espèces marines menacées.