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  • AFP / Par Pierre CELERIER | Crée le 13.10.2024 à 16h00 | Mis à jour le 13.10.2024 à 16h00
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    Une aide à domicile auprès d'une personne âgée. En France, l'espérance de vie à la naissance était en 2019 de 79,7 ans pour les hommes et 85,6 pour les femmes. Photo archives / FREDERICK FLORIN / AFP
    L'accroissement de l'espérance de vie, spectaculaire au siècle dernier, est en net ralentissement depuis trente ans dans les pays où elle est la plus élevée et ne pourra se poursuivre au XXIe siècle en l'absence de progrès décisifs pour ralentir les effets du grand âge, selon une étude démographique parue lundi.

    Jusqu'au milieu du XIXe siècle, l'espérance de vie à la naissance oscillait entre 20 et 50 ans. Au siècle suivant, les avancées en médecine et santé publique ont "produit une révolution de la longévité", rappelle l'étude signée par le démographe américain S. Jay Olshansky et parue lundi 7 octobre dans Nature Aging.

    Alors que les humains gagnaient auparavant en moyenne un an d'espérance de vie en un ou deux siècles, le gain est passé à trois ans d'espérance de vie par décennie au cours du XXe siècle.

    Mais cette progression a-t-elle une limite? En France, dont l'ex-doyenne de l'humanité Jeanne Calment est décédée à 122 ans, l'espérance de vie à la naissance était en 2019 de 79,7 ans pour les hommes et 85,6 pour les femmes.

    Dès 1990 des chercheurs, et notamment le Pr Olshansky, ont pronostiqué une limite aux progrès de la médecine face au vieillissement. D'autres ont défendu au contraire l'absence théorique d'un plafond biologique.

    "Nous ne pouvons plus obtenir de gains significatifs d'espérance de vie fondés sur la réduction des maladies", dit-il à l'AFP.

    "Compression de la mortalité"

    Il a appuyé sa démonstration sur les statistiques des huit pays connaissant l'espérance de vie la plus longue à la naissance (Australie, Corée du Sud, Espagne, France, Italie, Japon, Suède, Suisse) sur la période 1990-2019.

    Leurs populations peuvent espérer vivre en moyenne 6,5 ans de plus s'ils sont nés en 2019 plutôt qu'en 1990. Un gain bien inférieur à celui enregistré sur la période précédente.

    Ces résultats "suggèrent que la bataille de l'humanité pour une longue vie est largement achevée", conclut l'étude. Même si une majeure partie des pays du monde attendent encore de bénéficier des avancées de santé publique qui ont profité aux plus riches.

    La lutte pour l'espérance de vie est simplement victime aujourd'hui de la "loi des rendements décroissants", explique à l'AFP le démographe et épidémiologiste Jean-Marie Robine, qui n'a pas participé à l'étude.

    Les gains enregistrés au XXe siècle sont d'abord le fruit d'une réduction drastique de la mortalité infantile. Or, en la réduisant "on fait immédiatement des gains considérables d'espérance de vie", rappelle ce directeur de recherche émérite à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

    "Et puis progressivement on va se mettre à réduire la mortalité de l'âge moyen" et à faire des gains sur celle des seniors après la Deuxième guerre mondiale, au point qu'aujourd'hui "pas beaucoup de monde ne meurt avant 70 ans". Au bout du compte les populations bénéficient d'une "compression de la mortalité" vers une tranche d'âge élevée. Autrement dit, d'une "réduction de l'inégalité sociale face à la mort". 

    Le plafond de la "fragilité"

    La marge de progression restante est d'autant plus réduite, selon l'étude. Dans les pays considérés, il faudrait réduire la mortalité, pour toutes causes et à tout âge, d'environ 20% pour que l'espérance de vie des femmes à la naissance passe de 88 à 89 ans.

    Pour les populations nées en 2019 les chances de survie jusqu'à 100 ans touchent seulement 5,1% des femmes et 1,8% des hommes.

    Ce qui fait dire à S. Jay Olshansky que "la porte qui nous reste ouverte est celle de la science de la gérontologie". Et qu'en l'absence de percée dans ce domaine il vaudrait mieux privilégier la "durée de vie en bonne santé que l'espérance de vie".

    Jean-Marie Robine, pour sa part, note qu'il reste du "grain à moudre" pour réduire la mortalité entre 75 et 95 ans.

    Au-delà, il fait le pari que si "on est bloqué par la fragilité des personnes âgées, ce n'est pas parce qu'on l'est aujourd'hui qu'on le sera indéfiniment".

    "On n'a jamais eu autant de laboratoires et de chercheurs, publics ou privés, qui cherchent des solutions" au plafond de la "fragilité" des personnes âgées, qui les rend vulnérables à des "évènement extrêmes".

    Et donc "l'idée qu'on soit à la fin des progrès est une illusion", selon lui.

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