fbpx
    Nouvelle Calédonie
  • Baptiste Gouret | Crée le 10.10.2024 à 17h58 | Mis à jour le 10.10.2024 à 17h58
    Imprimer
    Selon l’Autorité de la concurrence, les protections de marché qui s’appliquent notamment sur le riz transformé en Nouvelle-Calédonie, ont été à l’origine des pénuries qu’a connu le territoire aux premières semaines de la crise. Photo d'illustration/Niko Vincent
    L’institution a rédigé une longue note dans laquelle elle développe deux scénarios dont pourraient se saisir les pouvoirs publics pour faire évoluer le modèle économique calédonien, fragilisé selon elle par de trop nombreuses protections de marché aux effets délétères sur les prix et l’emploi.

    En pleine réflexion sur la refonte de son modèle économique et social, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a reçu une contribution spontanée de l’Autorité de la concurrence en Nouvelle-Calédonie (ACNC). Une note de vingt-deux pages, publiée le 8 octobre, dans laquelle l’institution développe des pistes de développement qui s’orientent toutes vers une même ambition : sortir la Nouvelle-Calédonie de son système protectionniste, dont la crise a révélé les "fragilités", comme en témoignent "les pénuries constatées en mai et juin 2024 sur des produits de grande consommation soumis à des restrictions aux importations comme le riz, les pâtes et la farine", introduit l’ACNC.

    En Nouvelle-Calédonie, un certain nombre de produits fabriqués ou transformés localement sont en effet "protégés" sur arrêté du gouvernement à travers des interdictions d’importation, des quotas d’importation ou encore des taxes sur les produits importés. On appelle cela des "protections de marché". Une "spécificité majeure de l’économie calédonienne" que l’Autorité de la concurrence juge délétère.

    Des taxes plutôt que des quotas d’importation

    "Le système actuel semble difficilement compatible avec la lutte contre la vie chère, du fait des caractéristiques intrinsèques de la Nouvelle-Calédonie, liées notamment à l’étroitesse de son marché et à son éloignement […] Les barrières tarifaires renchérissent mécaniquement le prix des produits importés. Les mesures de protection quantitative renchérissent également les prix des produits importés, de façon indirecte. Les distributeurs locaux peuvent être incités à augmenter le prix de certains produits très demandés et contingentés en faible volume […] L’efficacité du système calédonien de régulation des marchés dans la sauvegarde de l’emploi local n’est pas démontrée", énumère l’institution.

    Pour elle, la Nouvelle-Calédonie n’a pas d’autres choix que de réformer ce système protectionniste. L’ACNC a ainsi imaginé deux scénarios. Le premier consiste en une amélioration du modèle de protections de marché, avec en premier lieu la réalisation d’un audit pour évaluer les "industries pour lesquelles le coût associé au protectionnisme est trop élevé comparé aux gains qu’en retire l’économie calédonienne, en termes d’emplois et de perspectives de croissance".

    L’ACNC suggère également de privilégier les taxes aux interdictions et quotas d’importation, celles-ci ayant "l’avantage de procurer des recettes fiscales et de maintenir une certaine pression concurrentielle sur les prix pratiqués par les producteurs locaux". Par ailleurs, l’Autorité de la concurrence soumet l’idée de créer une "autorité administrative indépendante (AAI)" qui déciderait de l’instauration et du renouvellement des protections de marché en lieu et place du gouvernement, afin d’éviter notamment d’éventuels conflits d’intérêts.

    De nouvelles filières à identifier

    Le second scénario de l’Autorité propose, lui, un abandon complet du modèle protectionniste calédonien pour adopter celui "d’ouverture-spécialisation". Il serait fondé sur "l’ouverture de l’économie calédonienne au commerce international", impliquant "la suppression des restrictions quantitatives aux importations, mais également une baisse significative des barrières tarifaires".

    Cette nouvelle trajectoire supposerait également l’identification de filières dans lesquelles le pays pourrait se spécialiser, à l’image de "la gestion et valorisation durable des ressources halieutiques, la sylviculture, le tourisme durable ou encore l’économie circulaire", énumère l’ACNC, citant une étude de l’AFD, de WWF France et de l’Ademe menée en décembre 2020. Une politique de spécialisation qui donnerait lieu à la création d’un "Commissariat au plan", chargé d’effectuer ce travail d’identification des filières stratégiques, ainsi que d’un "grand ministère de l’industrie" pour mettre en œuvre la politique industrielle définie par le gouvernement.

    Une série de propositions dont pourrait bien s’emparer le gouvernement avant le lancement, jeudi 17 octobre, d’une conférence économique au centre culturel Tjibaou visant à définir les grandes orientations de son plan de sauvegarde, de refondation et de reconstruction (S2R).

    La Fédération des entreprises et des industries voit rouge

    La contribution de l’Autorité de la concurrence a été très mal accueillie par la Fédération des industries de Nouvelle-Calédonie, récemment renommée la Fédération des entreprises et des industries (Feinc). Cette dernière juge en effet, dans un communiqué diffusé ce jeudi 10 octobre, que l’ACNC "outrepasse ses prérogatives", "mène des instructions à charge contre le tissu productif et agricole calédonien" et "ne poursuit que ses propres objectifs : soumettre l’économie calédonienne au libre-échange et à la mondialisation indépendamment des conséquences".

    La Feinc déplore l’absence d’une "étude quantitative" dans la note produite par l’Autorité, dont le travail "manque cruellement de rigueur et de déontologie, pour ne pas dire d’honnêteté".

    Demande de dissolution de l’ACNC

    La Fédération des entreprises et des industries pointe par ailleurs ce qu’elle considère comme une "contre-vérité", à savoir la responsabilité que porteraient les protections de marché dans les pénuries de mai et juin 2024. "Cette malhonnêteté intellectuelle relève de l’absurde, car avec une telle logique, autant dire que les régulations de marché sont responsables des émeutes de mai 2024."

    Pour la Feinc, "c’en est trop", car "ce sont les autonomies alimentaires, économiques et sociales de la Nouvelle-Calédonie qui sont clairement remises en cause par l’ACNC". La Fédération va ainsi jusqu’à demander au gouvernement et au Congrès de "dissoudre l’Autorité de la concurrence" et promet une "analyse détaillée de la note" produite par l’ACNC "pour relever l’ensemble des manquements à la rigueur, le parti pris inconsidéré ou les manipulations opérées".

    MERCI DE VOUS IDENTIFIER
    X

    Vous devez avoir un compte en ligne sur le site des Nouvelles Calédoniennes pour pouvoir acheter du contenu. Veuillez vous connecter.

    J'AI DÉJA UN COMPTE
    Saisissez votre nom d'utilisateur pour LNC.nc | Les Nouvelles Calédoniennes
    Saisissez le mot de passe correspondant à votre nom d'utilisateur.
    JE N'AI PAS DE COMPTE

    Vous avez besoin d'aide ? Vous souhaitez vous abonner, mais vous n'avez pas de carte bancaire ?
    Prenez contact directement avec le service abonnement au (+687) 27 09 65 ou en envoyant un e-mail au service abonnement.
  • DANS LA MÊME RUBRIQUE
  • VOS RÉACTIONS