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    Nouvelle Calédonie
  • Propos recueillis par Jean-Luc Uedre pour Outremers360 | Crée le 19.04.2024 à 14h00 | Mis à jour le 19.04.2024 à 14h08
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    Rivaldo Pawawi L’esprit Coubertin, un film sur les JO avec l’acteur kanak originaire de Lifou. Illustration Outremers 360
    Première expérience au cinéma pour Rivaldo Pawawi, également appelé Wakélé, un jeune Kanak originaire de Lifou. Il sera à l’affiche du film L’Esprit Coubertin, un long métrage sur les Jeux olympiques qui doit sortir le 8 mai au cinéma. Rencontre inédite avec un passionné du grand écran, qui se laisse porter par le vent, grâce à notre partenaire Outremers360.

    Du haut de vos 26 ans, qu’est-ce qui fait, que l’on décide un jour de se lever de son lit, et de faire du cinéma ?

    J’ai toujours été passionné de cinéma, depuis mon enfance. Chez moi, je n’avais pas la télévision, alors dès que j’avais une occasion de regarder des films, je profitais à fond. Je regardais Canalsat et des séries françaises comme H. On m’a dit que je ressemblais beaucoup à Ramzy. Mais c’est vrai, on a la même corpulence, la taille et surtout j’étais un petit rigolo. Après, j’ai eu l’occasion de travailler au Cinécity, à Nouméa. Mais, ma passion a pris une autre tournure quand je suis arrivé en France, en 2016, pour mes études. Contrairement à Nouméa, dans l’Hexagone il y a beaucoup plus de cinéma. Et surtout ça coûte moins cher, alors j’y vais le plus souvent possible. Mon style cinématographique s’est affiné. Avant je regardais de tout, et aujourd’hui j’aime beaucoup la romance française ou américaine. Je me suis pris de passion à voir le regard des acteurs, les temps de pause. J’accorde de plus en plus d’attention au jeu d’acteur.

    Vous êtes passé de spectateur à acteur. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?

    Je ne le réalise toujours pas. Le film va bientôt sortir au cinéma et j’ai du mal à me faire à l’idée. C’est quelque chose de tellement grand, et il me faut encore du temps pour prendre conscience de ça. La première fois que j’ai vu le film, j’étais gêné, j’avais l’impression de ne pas avoir été à la hauteur. Gêné aussi du fait, que chez nous les Kanak, il y a toujours le sentiment de se faire petit. Et là, de me voir sur grand écran, devant des centaines de personnes qui te regardent, j’étais vraiment intimidé. J’avais presque envie de vomir et de sortir de la salle. Je me suis posé beaucoup de questions, c’était un petit conflit intérieur, personnel. Mais aujourd’hui, j’assume, je suis content et même très fier de ce que j’ai fait. Et cette crainte me permet de garder les pieds sur terre, et c’est tant mieux.

    J’ai rencontré des acteurs magnifiques comme Benjamin Voisin, c’est une pépite ce mec.

    Comment s’est passée l’aventure de L’esprit Coubertin ?

    Dans un groupe sur Messenger, un ami avait mis une offre de casting pour un film. Je me suis dit que ça pourrait être un bon délire. J’ai envoyé ma candidature, quelques jours avant la date butoir. Ils m’ont appelé et pendant trois mois environ, j’ai fait des allers et retours entre Montpellier et Paris pour faire des castings. Le courant est vite passé avec l’acteur principal et le réalisateur. Le tournage s’est très bien passé. Je plaisantais avec les maquilleuses, l’ingénieur son, les costumières, je m’entendais bien avec tout le monde. Il y avait une bonne ambiance. On me disait qu’habituellement les tournages ne sont pas si chaleureux, mais cette fois-ci, j’ai eu de la chance. Et j’ai rencontré des acteurs magnifiques comme Benjamin Voisin, c’est une pépite ce mec. Ou encore Emmanuelle Bercot, cette femme a une sagesse incroyable.

    Le tournage a duré à peu près quatre mois, il s’est fini en avril 2023. Au moment du clap de fin, j’avais les larmes aux yeux, j’ai pensé à ma maman et à ma famille à Wedrumel. Je me suis dit qu’enfin je l’avais fait. En juillet, je suis rentré définitivement en Calédonie. C’était un super délire ce tournage, mais je m’en foutais un peu, je voulais retourner voir mes parents. Mais ce film m’a fait revenir en France. J’étais à Nouméa, la production m’a appelé un vendredi et j’ai pris l’avion le dimanche même. C’était un départ vraiment précipité et imprévu. Maintenant je réalise que c’est bien de rester un peu dans l’Hexagone, pour voir les retombés du film. Et il faut que j’entretienne aussi cette chance, car pour moi le clap de fin n’est pas encore d’actualité, je ne le vois pas encore.

    Et votre personnage dans le film, Jacob, ce nageur venu du Vanuatu il est comment ? Est-ce que vous vous reconnaissez à travers lui ?

    Jacob Taufa vient participer aux Jeux olympiques, mais surtout pour profiter. C’est un athlète, mais il boit de l’alcool, il fume, il fait la fête… Au début, je me suis dit que ce personnage pourrait se rapprocher de moi, ou en tout cas des gens de mon entourage, des cousins, des amies. Mais finalement je ne suis pas comme lui. Ce n’est pas moi du tout. Il se laisse trop aller, il est trop dépravé et dévergondé. Je sais kiffer la vie, mais on n’a pas la même façon de le faire. Le personnage de Jacob m’était toutefois très familier, il me rappelle un cousin de Calédonie. Mais surtout, Jacob n’existe pas pour lui-même, c’est pas " lui pour lui, c’est lui pour nous ". Il vient faire passer un message aux Jeux Olympiques. Le message de la montée des eaux et du réchauffement climatique qui menace son île. C’est un gars imparfait, qui vient porter un message important.


    Dans cette comédie délurée de Jérémie Sein, ayant pour trame de fond les JO, Rivaldo Pawawi partage l’affiche avec Benjamin Voisin, Emmanuelle Bercot, Grégoire Ludig du Palma Show, Laura Felpin ou encore, Aure Atika. Photo DR

    Il est Vanuatais et moi je suis Kanak. Le Vanuatu est voisin de la Nouvelle-Calédonie, on est très proche. Et cette proximité de nos cultures fait que le personnage est plus authentique, on y croit beaucoup plus. Pendant le tournage, j’ai dû porter des costumes vanuatais. Cela ressemblait beaucoup à ce qu’on peut porter chez nous sur le Caillou. Ce n’était pas nouveau pour moi. Mais le fait l’avoir fait, c’est quelque chose qui parle à toute la Mélanésie et surtout qu’on se sent proche de ce personnage.

    La culture kanak est une société ancestrale caractérisée par des valeurs telles que l’humilité, la retenue ou la réserve. En tant que kanak, avoir un rôle dans un film de la comédie française, qu’est-ce que ça signifie pour vous, sur le plan des valeurs, de la pudeur ?

    Quand j’ai lu le scripte, j’ai vu et j’ai accepté. J’étais prêt à m’engager dans ce projet. Je sais que le fait de montrer son corps, ça va un peu à contresens de nos coutumes. Je me dis que c’est bien, ça montre que les temps ont changé et que le monde a évolué. Je ne dis pas aux gens que " ça y est, on est en 2024, arrêtez de rester dans votre trou ". Je dis juste qu’il faut aller avec son temps et accepter de faire passer des messages d’une manière différente. Il faut dissocier le personnage de la personne, et aller chercher le sens du message. Le réalisateur me demandait à plusieurs reprises si ça ne me dérangeait pas de faire certaines scènes. Je lui ai dit que je veux être le personnage qu’il veut que je sois. C’est aussi une autre forme des valeurs kanak. C’est que quand on vient et qu’on s’engage, on donne. Mais on ne donne pas à moitié, on fait bien les choses. Toujours dans un état d’esprit, de respect et d’écoute et d’humilité.

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