- Anthony Tejero | Crée le 04.12.2023 à 18h06 | Mis à jour le 05.12.2023 à 10h26ImprimerPour le ministre des Armées, "il ne faut pas avoir de naïveté sur ce qui nous attend car les catastrophes naturelles, quelles que soient nos opinions politiques, s'abattent malheureusement sur la région, donc soit on est passif, soit on y répond. " Photo Anthony TejeroPour son deuxième jour de visite sur le Caillou, le ministre des Armées a dévoilé sa stratégie militaire dans le Pacifique et plus particulièrement en Nouvelle-Calédonie où l’État annonce injecter 17 milliards de francs d’ici 2030 pour renforcer les moyens existants et remédier aux "sous-investissements" des précédents gouvernements. En témoigne le nouveau quai des Patrouilleurs d’Outre-mer, inauguré ce lundi, qui permet d’accueillir des bâtiments de nouvelle génération avec une force de frappe nettement revue à la hausse.
Un investissement massif pour redorer le blason de l’armée sur le Caillou
C’est la grande annonce de la journée. À la base navale de la pointe Chaleix, Sébastien Lecornu a annoncé que l’État injectera près de 17 milliards de francs sur le Caillou rien que pour "le volet infrastructures", dans le cadre de loi de programmation militaire 2024-2030. Et le ministre des Armées ne mâche pas ses mots : cette enveloppe est liée à "un sous-investissement de la part des gouvernements successifs pendant des années" en Nouvelle-Calédonie.
"Il suffit d’aller pousser la porte d’un bâtiment de la base aérienne de La Tontouta, de la base navale ou du quartier de la défense pour voir qu’il y a un rattrapage important à mener", assure Sébastien Lecornu, qui précise qu’il ne s’agit en aucun cas d’une "remilitarisation" de la zone, faisant allusion au discours du FLNKS. "L’essentiel de ces sommes n’est pas investi pour être plus belliqueux, contrairement à ce que certains voudraient nous faire croire. C’est tout simplement parce qu’on a besoin de réinvestir sur notre outil de défense pour toutes ses missions qui sont notamment de secours à personne lorsqu’il y a des catastrophes naturelles qui sont de plus en plus violentes et de plus en plus fréquentes et qui peuvent toucher plusieurs pays de la région en même temps. Il faut donc, bien évidemment, qu’on remette des moyens sur la table sans quoi on ne protégerait pas les populations."
Sébastien Lecornu, ministre des Armées, a visité le patrouilleur de "nouvelle génération" Auguste Bénébig. Photo Anthony TejeroUne aide "bienvenue" pour le monde économique. "Ces 17 milliards de francs vont permettre de faire travailler beaucoup d’entreprises locales du bâtiment et des travaux publics. Tout cela, c’est de l’argent qui vient de Paris et qui permet, non seulement de faire des choses utiles pour le pays, mais aussi de faire vivre l’économie locale, rappelle Sébastien Lecornu, qui troque un temps sa casquette de chef de la défense contre celle d’ancien ministre des Outre-mer. Mes nombreuses visites sur ce territoire ne sont pas complètement étrangères à cet engagement que j’ai pris devant le Parlement. J’ai moi-même surveillé cette copie de près, pour ne pas dire que j’ai pris le stylo pour la signer."
Un nouveau quai pour deux patrouilleurs de "nouvelle génération"
La visite ministérielle a été marquée par l’inauguration, en début d’après-midi, du nouveau quai des Patrouilleurs d’outre-mer, à la base navale de la pointe Chaleix. Cette infrastructure doit permettre d’accueillir les deux nouveaux patrouilleurs de l’armée, dont l’Auguste-Bénébig, déjà opérationnel sur le Caillou (le second bâtiment étant prévu pour 2025). Ce quai a été conçu pour pouvoir également abriter jusqu’à quatre patrouilleurs des "nations alliées".
Lancé en avril 2022 et achevé en septembre 2023, ce chantier a notamment nécessité de réaliser un dragage de 16 000 mètres cubes dans la baie. Coût total de l’opération : 13,4 millions d’euros, soit plus d’1 milliard de francs.
Inauguration quai des patrouilleurs - visite Sébastien Lecornu. Photo Anthony TejeroDes investissements salués par le ministre, monté à bord de l’Auguste-Bénébig : "C’est un patrouilleur de nouvelle génération, qui a pratiquement trois fois le tonnage des patrouilleurs précédents, soit un passage de 400 à 1300 tonnes, présente Sébastien Lecornu, listant les nouvelles missions que pourra effectuer ce nouveau bâtiment : "Il va aller jusqu’à 10 000 km des côtes, il va avoir une forte autonomie, il va être capable d’avoir des moyens de renseignements et de connectivité très importants. C’est un patrouilleur qui va permettre de protéger nos zones économiques exclusives notamment contre les pollutions et contre les pêches illégales, bien qu’il n’y en ait quasiment plus grâce à l’action des Forces armées de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française. Mais ces nouveaux patrouilleurs vont nous permettre aussi d’aller plus loin, à la source du problème, c’est-à-dire plus au nord dans le Pacifique, aider d’autres partenaires de la région qui n’ont pas les mêmes moyens et en étant, ainsi, plus solidaires entre nous."
Vers une hausse du nombre de réservistes
La visite de la base navale s’est achevée, enfin, par des signatures en cascade de conventions entre les Fanc (Forces armées de Nouvelle-Calédonie) et plusieurs employeurs (province Sud, CCI, Medef, Aircalin, Dumez, Linc, etc.) afin de donner plus de souplesse aux employés qui voudraient s’engager en tant que réservistes au sein de l’armée.
Une convention de promotion des réserves entre la Chambre de commerce et d'industrie de Nouvelle-Calédonie (CCI) et les Fanc a notamment été signée. Photo Anthony TejeroActuellement, le Caillou compte près de 2 000 militaires dont 500 réservistes. Si l’objectif national est de doubler les effectifs de réserve, cette ambition ne semble pas tenable sur le Caillou pour le ministre des Armées, qui table davantage sur un renfort de 200 volontaires supplémentaires : "C’est un chiffre qui me semble atteignable, qui va permettre à des Calédoniens de se spécialiser et d’apprendre de nouvelles professions comme marin ou des métiers liés au génie parce que, souvent, ce sont ces compétences qui sont projetées pour lutter contre les catastrophes naturelles, pour nettoyer une forêt, reconstruire des équipements publics, sortir des personnes sous des décombres, etc. Il peut aussi s’agir de donner la main à la base navale, à la base aérienne ou au régiment, s’il y a les soldats projetés sur des missions plus loin, afin que les tâches, sur place, continuent à être remplies."
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