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  • Anthony Tejero | Crée le 14.01.2025 à 05h00 | Mis à jour le 14.01.2025 à 07h30
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    Dès qu’il y a suffisamment de touristes, Isidore propose des sorties en bateau vers l’îlot Brosse, comme samedi dernier. Photo Anthony Tejero
    Alors que les acteurs du tourisme s’apprêtaient à réaliser une très bonne année 2024, les exactions ont mis un coup d’arrêt brutal à la filière sur l’île des Pins, où les touristes reviennent au compte-goutte. Une reprise "confidentielle" en cette période de vacances où la plupart des structures affichent complet habituellement. Alors que les transports en commun accumulent les incidents techniques, que les programmes de vols ont été nettement revus à la baisse et que les visiteurs étrangers ne sont pas encore au rendez-vous, les professionnels du secteur craignent "le pire" pour 2025. Reportage.

    Il plane comme un air de basse saison en pleine période de vacances estivales sur l’île des Pins. Plages, restaurants, gîtes et hôtels… Les visiteurs se font encore rares à Kunié. "Nous sommes mi-janvier, ce qui correspond au pic annuel de fréquentation. Habituellement, tout est complet, mais là, j’enregistre moins de 50 % d’occupation. En temps normal, j’ai six mois de réservation à l’avance. Là, c’est au jour le jour", se désole Nicolas Zerathe, le directeur de Nataiwatch. Ce gîte et camping emblématique de la baie de Kanuméra, qui affiche "un taux de remplissage à l’année de plus de 90 %" (hors période de crise), est un "thermomètre" de l’activité touristique sur l’île. Sauf que depuis plusieurs mois, le mercure, tombé à zéro aux lendemains des émeutes, peine toujours à redécoller. "La reprise reste confidentielle, y compris dans la consommation car les quelques personnes qui reviennent nous voir font beaucoup plus attention aux dépenses", poursuit le gérant, assurant d’ores et déjà que "2025 sera pire que 2024". Car l’année dernière avait démarré sur les chapeaux de roues jusqu’au 13 mai, synonyme d’arrêt brutal et total du tourisme pendant de longs mois.

    "On fera tout pour éviter un plan social"

    "Nous aurions dû avoir une année folle. Au premier trimestre, on était déjà à + 20 % (de chiffre d’affaires), sauf qu'au final, je suis tombé à -30 % en décembre." Et encore, cet établissement a limité la casse en décidant de rouvrir son service de restauration dès juin et les hébergements à partir d’août, histoire "de rentrer un peu d’argent". Pour autant, entre les incertitudes liées au maintien du chômage partiel et des aides de l’État et les départs massifs du Caillou sans retour significatif des touristes internationaux, Nicolas Zerathe ne cache pas son inquiétude. "On fera tout pour éviter un plan social mais on prévoit une année vraiment compliquée. Je m’attends à perdre 50 % du chiffre d’affaires par rapport à celui de 2023 et 2019 qui sont des années de référence."


    En ce vendredi midi, la terrasse du restaurant de l’hôtel Kou-Bugny est bien vide, ce qui n’empêche pas les employés de garder le sourire. Photo Anthony Tejero

    À quelques encablures de là, la morosité est également palpable à l’Igesa, ce vaste village de vacances qui accueille notamment les familles de militaires. Et où les tout premiers clients n’ont fait leur retour qu’à partir de Noël. Par conséquent le site a perdu la moitié de ses visiteurs l’an dernier, soit 7 000 personnes contre près de 14 000 en 2023.

    "Et les perspectives sont réduites à néant pour 2025 puisque nous n’avons quasiment aucune réservation pour les mois à venir"; glisse William Garçon, le directeur adjoint de la structure, qui en raison de la crise, a également dû suspendre sa société de transport et d’accueil chez l’habitant qu’il tient avec sa femme. Comme bon nombre de Kunié rencontrés, cet habitant pointe les difficultés de transports qui aggravent encore plus la situation (tant pour l'afflux de visiteurs que pour l'acheminement de marchandises). "Nous avons eu énormément d’annulations en raison des pannes et incidents qu’ont accumulées Aircal et le Betico. Les gens ne veulent plus venir au cas où ils resteraient bloqués."


    Ce groupe de touristes, dont deux habitants de Sydney enchantés par leur séjour, profite des paysages paradisiaques du sud de Kunié. Photo Anthony Tejero

    Ces deux chefs d'entreprise sont par ailleurs des membres actifs de la Fitae, Fédération de l’île des pins du tourisme et des acteurs économiques, fondée afin de (re) dynamiser la filière à Kunié. Pour ce collectif, la reconquête du marché ne pourra pas se faire tant que les rotations d’avion resteront réduites comme peau de chagrin. Actuellement, les vols vers Nouméa ne sont même plus quotidiens.

    "Comment relancer le tourisme sans moyens de transport ?"

    "En cette période de vacances, nous n’avons que cinq rotations hebdomadaires au lieu de 25 habituellement en janvier. Comment relancer le secteur et construire des packages et autres produits de vente sans transport ? interpelle Nicolas Zerathe. C’est un véritable frein. Il faut être crédible à un moment donné. Et on craint que le pire soit encore à venir car ces outils (dont le Betico 2) sont vieillissants et ces incidents risquent de s’intensifier. On tire la sonnette d’alarme depuis des années sur la nécessité de réformer le schéma des transports en Nouvelle-Calédonie, mais rien n’a été fait."


    William Garçon, directeur adjoint de l’Igesa, en baie de Kuto, et membre de la Fitae, Fédération île des pins et acteurs du tourisme. Photo Anthony Tejero

    Autre défi de taille à relever pour la fédération : redorer le blason de l’île la plus proche du paradis, ébranlée par plusieurs épisodes de violence entre avril et septembre dernier. "L’image de la destination a été ternie et il y a encore une peur chez certaines personnes, même si l’île est redevenue complètement sûre pour les visiteurs. On assiste à un certain désamour de la part de clients qui ne viennent plus pour des raisons quasi politiques mais aussi à cause de la désinformation qui se répand sur les réseaux sociaux, analyse William Garçon, qui ressent également un désengagement de la province Sud, compétente en matière d’aménagement touristique. Nos infrastructures d’accueil sont vieillissantes et rien n’a vraiment avancé en termes de rénovation. Depuis le décès du grand chef Hilarion Vendegou, l’institution se désintéresse un peu de nous. La nomination d’un nouveau grand chef a pris près de deux ans et je crois que ces combats de gouvernance ont eu lieu au détriment du développement de l’île des Pins."

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