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    Environnement
  • Nathalie ALONSO / AFP | Crée le 14.12.2023 à 11h27 | Mis à jour le 14.12.2023 à 11h27
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    La COP28 a pris fin mercredi à Dubaï. Photo Giuseppe CACACE / AFP
    Pour la première fois, les pays du monde entier ont approuvé mercredi lors de la 28e conférence sur climat de l’ONU à Dubaï un compromis historique ouvrant la voie à l’abandon progressif des énergies fossiles causant le réchauffement, malgré de nombreuses concessions aux pays riches en pétrole et en gaz.

    "Nous avons une formulation sur les énergies fossiles dans l’accord final, pour la première fois", s’est félicité Sultan Al Jaber, président émirati de la COP28, qui avait été contesté ces derniers mois en raison de son poste à la direction de la compagnie pétrolière des Emirats arabes unis, Adnoc.

    Il aura fallu près de trente ans de COP pour "arriver au début de la fin des énergies fossiles", a souligné le commissaire européen au Climat, Wopke Hoekstra.

    Le texte adopté par consensus, sans qu’aucun des 194 pays ni l’Union européenne n’objecte, est un compromis imparfait, pour de nombreux délégués et ONG. Il n’appelle pas directement à la sortie des énergies fossiles, décevant la centaine de pays qui l’exigeaient, et comporte des failles pour les pays souhaitant poursuivre l’exploitation de leurs réserves d’hydrocarbures.

    La déception des Etats insulaires

    Le soulagement général contraste avec la déception des pays insulaires rongés par la montée des océans, qui voulaient une décision plus forte. "Nous avons fait un pas en avant […], mais c’est d’un changement exponentiel dont nous avions vraiment besoin", a regretté Anne Rasmussen, la représentante des îles Samoa, qui préside l’alliance des petits Etats insulaires (Aosis).

    Le Brésil a exhorté les pays riches à apporter "les moyens nécessaires" aux nations en développement, pour qu’elles installent des centrales solaires par exemple.

    Le chef de l’ONU Climat Simon Stiell a d’ailleurs appelé le monde à passer aux actes, tout de suite. "Tous les gouvernements et toutes les entreprises doivent maintenant transformer sans tarder ces engagements en résultats concrets pour l’économie", a-t-il dit.

    L’accord, huit ans après celui de Paris, est adopté à la fin d’une année 2023 qui sera la plus chaude jamais enregistrée.

    Chine constructive

    Malgré les réserves, une ovation debout a accueilli le coup de maillet de Sultan Al Jaber. Jamais dans l’histoire des conférences climatiques des Nations unies les énergies fossiles dans leur ensemble – pétrole, gaz, charbon – n’avaient été désignées, alors que leur combustion depuis le XIXe siècle est la première cause du réchauffement.

    Dans un monde en proie aux conflits, cet accord est "une raison d’être optimiste", a lancé l’émissaire américain pour le climat, John Kerry.

    "Au cours des dernières 48 heures, certains d’entre nous ont pensé que cela pourrait échouer", mais "un certain nombre de pays producteurs de pétrole et de gaz […] se sont mobilisés et ont dit 'vous savez, nous voulons que cela réussisse'", a-t-il affirmé.

    Le ministre saoudien de l’Energie, le prince Abdulaziz bin Salman, s’adressant à Al Arabiya Business, a salué le texte final, tout en soulignant qu’il n’y avait "pas d’accord sur la fin immédiate ou progressive des combustibles fossiles, mais sur un processus de transition".

    La Russie a d’ailleurs mis en garde contre toute sortie non organisée des fossiles : "Nous avons, à chaque occasion, souligné les conséquences d’une sortie chaotique, et sans le soutien de la science, du charbon, du pétrole et du gaz", a déclaré le chef de la délégation russe Rouslan Edelgueriev, cité par l’agence TASS.

    La Chine, et son émissaire pour le climat Xie Zhenhua arrivé à la plénière les deux pouces levés, ont été jugés essentiels au compromis forgé ces derniers jours.

    Décennie cruciale

    Que dit le texte de 21 pages exactement ?

    Le 28e paragraphe, sur 196, appelle à "transitionner hors des énergies fossiles dans les systèmes énergétiques, d’une manière juste, ordonnée et équitable, en accélérant l’action dans cette décennie cruciale, afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050 conformément aux préconisations scientifiques".

    La transition concerne donc l’énergie, et non d’autres secteurs comme la pétrochimie. Mais l’appel à agir dès la décennie en cours était une exigence de l’Union européenne.

    En choisissant le terme de "transitioning away" ("transitionner hors de", "s’éloigner", "abandonner" selon les traductions possibles en français), le texte ne parle plus de "phase-out" ("sortie") du pétrole, du gaz et du charbon, un terme devenu depuis des mois la bannière derrière laquelle s’étaient ralliés une centaine de pays et des milliers d’ONG.

    Une source proche de la présidence émiratie raconte que le texte a été finement "calibré" pour éviter, notamment, un blocage de l’Arabie saoudite. Mais tout en laissant suffisamment d’ambiguïté dans les formulations pour que chacun y trouve son compte.

    Un premier pas

    De nombreuses ONG et experts, analysant les finesses diplomatiques du texte, ont émis des réserves. Mais elles soulignent l’importance d’avoir brisé le tabou des fossiles dans une COP.

    "Si Glasgow (2021) était la première fissure dans le barrage, avec l’appel à réduire le charbon, c’est désormais une grosse rupture avec l’extension au pétrole et au gaz", estime Alden Meyer, du groupe de réflexion E3G. "Les Saoudiens essaient de colmater furieusement le barrage mais le sens de l’histoire est clair".

    "Le génie ne retournera jamais dans la bouteille", ajoute Mohamed Adow, directeur de Power Shift Africa, autre groupe de réflexion.

    Dans l’accord figure aussi une reconnaissance du rôle joué par des "énergies de transition", allusion au gaz, pour assurer la "sécurité énergétique" des pays en développement, là encore une concession faite aux producteurs de gaz fossile.

    Le texte contient aussi de multiples appels liés à l’énergie : tripler les capacités d’énergies renouvelables et doubler le rythme d’amélioration de l’efficacité énergétique d’ici à 2030 ; accélérer les technologies "zéro carbone" et "bas carbone", dont le nucléaire, l’hydrogène bas carbone, et le balbutiant captage et stockage du carbone, défendu par les pays producteurs de pétrole pour pouvoir continuer à pomper des hydrocarbures.

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