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  • AFP | Crée le 05.11.2024 à 16h20 | Mis à jour le 05.11.2024 à 16h20
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    Pour Kenan Khalilzade, militant du groupe Ecofront basé à Bakou, les préparatifs de la conférence climatique donnent lieu à "des pressions gouvernementales" accrues sur les écologistes. Photo Vano SHLAMOV / AFP
    Le défenseur azerbaïdjanais des droits humains et militant du climat Anar Mammadli allait chercher son fils à la crèche quand la police l’a appréhendé sous les yeux des enfants. Son arrestation n’est qu’un exemple parmi d’autres de la répression qui a cours dans le pays hôte de la conférence climatique COP29, qui débutera le 11 novembre, au risque, selon les critiques, de décrédibiliser les autorités de l’ex-République soviétique.

    Derrière les barreaux depuis son interpellation le 29 avril, Anar Mammadli encourt huit ans de prison pour "contrebande" s’il est reconnu coupable, déclare son collègue Bashir Suleymanli. Ensemble, ils ont fondé l’organisation Climate of Justice Initiative afin de promouvoir la justice environnementale en Azerbaïdjan, cette nation riche en pétrole et gouvernée d’une main de fer par la famille Aliev depuis plusieurs décennies. L’organisation "a été contrainte de fermer sous la pression du gouvernement avant même d’avoir commencé à sensibiliser l’opinion aux questions environnementales", rapporte M. Suleymanli. "Nous n’avons aucune plateforme pour nous faire entendre, sans parler du fait que nous ne pourrons pas organiser de manifestations pendant la COP29", déplore-t-il.

    Des organisations de défense des droits humains, dont Amnesty International et Human Rights Watch, un sénateur américain et le rapporteur spécial de l’ONU sur les défenseurs de l’environnement ont dénoncé les poursuites engagées contre M. Mammadli et exigé sa libération. Le Parlement européen a quant à lui dénoncé le 24 octobre la recrudescence des atteintes aux droits humains en Azerbaïdjan, jugeant cette situation "incompatible" avec l’organisation de la conférence de l’ONU.

    "Mesures sévères"

    A Bakou, les routes sont en réfection et les bâtiments repeints : les autorités tiennent à ce que la capitale apparaisse sous son meilleur jour lorsqu’elle accueillera les dizaines de milliers de délégués et participants à la COP, du 11 au 22 novembre. Les groupes internationaux de défense des droits humains, eux, appellent l’ONU et le Conseil de l’Europe à "profiter de la dynamique de la COP29" pour "mettre fin à la persécution des voix critiques" en Azerbaïdjan.

    Selon Kenan Khalilzadé de l’organisation écologique Ecofront à Bakou, les préparatifs de la conférence climatique donnent lieu à "des pressions gouvernementales" accrues sur les militants. Lui-même affirme avoir été brièvement arrêté l’an dernier durant une manifestation à Soyudlu, un village reculé de l’ouest du pays. En 2023, la police a tiré des balles en caoutchouc et du gaz lacrymogène contre des villageois qui manifestaient contre la construction d’un étang censé collecter des déchets toxiques d’une mine d’or voisine. Plusieurs manifestants ont été arrêtés dans le cadre d’une violente répression et Soyudlu est resté bouclé par la police pendant des semaines. "La police m’a menacé de mesures sévères si jamais j’essayais de retourner à Soyudlu", confie M. Khalilzadé.

    Une enquête conduite par l’Organised Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP), un consortium de journalistes d’investigation, a déterminé que la mine, formellement exploitée par la compagnie britannique Anglo Asian Mining, était en fait la propriété des deux filles du président azerbaïdjanais, Ilham Aliev.

    Accusations "inacceptables"

    Tout signe de dissidence en Azerbaïdjan fait généralement l’objet d’une réponse vigoureuse du pouvoir, vivement critiqué en Occident pour la persécution des opposants politiques et le musèlement des médias. A 62 ans, Ilham Aliev dirige l’Azerbaïdjan avec une autorité implacable depuis 2003 et la mort de son père, Heydar Aliev, dirigeant communiste de l’ère soviétique et ancien général du KGB. L’Union pour la liberté des prisonniers politiques d’Azerbaïdjan a publié une liste de 288 prisonniers politiques, y compris des responsables politiques de l’opposition, des militants des droits et des journalistes. Parmi eux, plusieurs reporters d’AbzasMedia et Toplum TV, médias critiques du président Aliev, ainsi que l’avocat anti-corruption Gubad Ibadoghlu.

    Placé sous contrôle judiciaire qui l’empêche de quitter le pays et l’oblige à signaler tout déplacement hors de Bakou, il risque 17 ans de prison dans un dossier de faux-monnayage, des accusations "fabriquées" selon Amnesty International. Pourfendeur de la corruption, il affirme notamment que la manne de l’énergie permet au président Ilham Aliev et à sa famille de rester au pouvoir depuis plus de trente ans. Human Rights Watch et l’ONG Freedom Now ont publié en octobre un rapport documentant "33 cas médiatisés de poursuites pénales, de détention et de harcèlement" qui, selon elles, illustrent les efforts du gouvernement pour "décimer la société civile".

    De son côté, le ministère des Affaires étrangères azerbaïdjanais rejette des accusations "biaisées et inacceptables" et fustige des "motivations politiques inappropriées".

    Mais, pour Khadija Ismayilova, une journaliste d’investigation qui a passé plusieurs mois derrière les barreaux après avoir révélé des cas de corruption dans la sphère publique, les délégations de la COP29 devraient se pencher sur le bilan de l’Azerbaïdjan en matière de droits humains. "Les pays qui participent à la COP29 doivent avoir conscience que la société civile est écrasée et opprimée", assure-t-elle.

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