- Anna MALPAS / AFP | Crée le 20.11.2023 à 13h00 | Mis à jour le 20.11.2023 à 13h00ImprimerVitaliy, un ingénieur de Kryvyi Rig, ville située au milieu de l’Ukraine, pose devant sa pelleteuse blindée destinée au déminage. L’Ukraine compte de vastes zones parsemées de mines, obus et missiles, dont le déminage pourrait prendre de nombreuses années Photo Roman PILIPEY / AFPDans les régions ukrainiennes dévastées par la guerre, les sols sont truffés de mines, ce qui oblige les habitants à être inventifs pour éviter des morts. Vitaliy a transformé une pelleteuse en engin blindé qu’il utilise pour faire sauter les mines antipersonnel et antichar.
Après un exercice, Vitaliy montre quelques bosses sur un véhicule blindé que cet Ukrainien a mis au point pour localiser les mines et déminer un terrain à distance. Les dégâts sont plutôt limités, malgré la puissance des explosifs : l’engin vient d’être testé sur cinq mines antichar.
Vitaliy, qui dit ne pas pouvoir donner son nom de famille ni son métier, montre son prototype, basé sur une pelleteuse Hitachi, sur un terrain d’entraînement militaire du sud-est de l’Ukraine. Le véhicule peut être téléguidé ou conduit par un chauffeur.
"L’Ukraine est tellement minée que les secouristes sont tout simplement effrayés. C’est quasiment des mines sur des mines", explique-t-il.
Soutenir la production locale
Il dit avoir été contacté par l’administration militaire de la ville de Kryvyï Rig pour préparer le déminage des zones libérées dans les régions de Kherson et de Kharkiv.
En quittant ces territoires occupés, les Russes ont laissé derrière eux des mines "qui nous empêchent de lancer une contre-offensive efficace", regrette l’Ukrainien, qui a financé le projet via son entreprise.
La machine, développée avec l’aide d’un militaire, est dotée d’un grand bouclier de protection et de chaînes lestées qui martèlent le sol avec une force d’une tonne chacune, déclenchant ou détruisant les mines.
Le concept n’est pas nouveau, mais Vitaliy espère que le gouvernement choisira de soutenir la production locale pour éviter des importations coûteuses.
Bombes et missiles
En plus des mines placées par les soldats russes avant leur retrait, les sols ukrainiens contiennent aussi des bombes et missiles qui n’ont pas explosé mais restent dangereux.
Nettoyer cela pourrait prendre des années, selon des responsables.
Dernièrement, le véhicule artisanal de Vitaliy a réussi à détruire dix mines antipersonnel et cinq mines antichar durant des tests conduits par des instituts militaires.
L’engin n’a subi que des dommages facilement réparables, selon lui, notamment sur ses chaînes.
Efficace sur les grands espaces
Lors des tests sur les mines antipersonnel, un conducteur se trouvait à bord. "Bien entendu, il n’y avait pas de volontaire pour les mines antichar", précise Vitaliy. L’équipe a alors utilisé un système de contrôle à distance.
S’il est autorisé par l’armée, le véhicule pourrait être employé pour des opérations de secours mais pas dans des zones de combat, par manque de blindage, selon Vitaliy.
Il pense qu’il pourrait en revanche être très utile pour de grands espaces, que les équipes spécialisées mettent habituellement plusieurs jours à explorer.
"Le déminage est censé se dérouler à une vitesse de 2 km par heure ici. La largeur (d’un passage de l’engin) est de 4,5 mètres, c’est 9 000 mètres carrés par heure, aucune personne ne peut déminer une telle surface", dit-il.
"C’est comme une loterie"
Denys Nagovitsyne, du service d’Etat ukrainien des situations d’urgence (DSNS), estime que ce genre de véhicules "aidera" mais ne peut être que complémentaire du travail humain.
"Les machines ne peuvent ni aller partout ni voir tout", dit ce chef d’une unité pyrotechnique.
"Mais si vous avez une grande zone, comme un champ, une machine le parcourra plus rapidement et, en principe, assez bien", concède-t-il, expliquant que son service en achète.
Denys Nagovitsyne sait que son équipe, qui travaille à pied, risque en permanence de marcher sur des mines anti-personnel. "C’est comme une loterie", dit-il.
Plusieurs de ses collègues ont été tués dans le sud de la région de Kherson. Ils avaient trouvé des mines antichar qui semblaient inactives, mais il s’agissait d’un piège et la dernière a explosé.
Trop lentes ?
La sensibilisation du public est également une grande partie de leur travail. Les habitants vont chercher du bois de chauffage, des bouts de ferraille, parfois même avec leurs enfants, note Denys Nagovitsyne, avec frustration.
Son équipe voit parfois des fermiers travailler dans des champs qui n’ont pas encore été déminés et les prévient du danger – ce qui n’empêche pas, parfois, d’apercevoir ensuite leurs tracteurs brûlés.
Denys Nagovitsyne pense que les véhicules de déminage tels que celui développé par Vitaliy pourraient également s’enliser dans les terrains boueux, à cause de leurs poids. D’autant que ces véhicules ne détectent pas toujours les mines dites "papillon", de petite taille, selon lui.
Un fermier du coin, Oleksandre Ryabinine, n’est pas convaincu non plus. Après le retrait russe, l’armée et le service ukrainien des situations d’urgence ont déminé ses champs. Les machines ont "une faible productivité", juge-t-il, or il faut déminer "3 500 hectares de territoire anciennement occupé".
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