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  • Anthony Tejero | Crée le 15.10.2024 à 04h55 | Mis à jour le 15.10.2024 à 04h55
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    Rouvert depuis le 19 août, l’hôtel Koulouné est déserté par les touristes, y compris en cette période de vacances scolaires. En temps normal, les Calédoniens constituent plus de 80 % de la clientèle. Photo Anthony Tejero
    Cinq mois sans visiteur. Triste record pour la capitale du tourisme de la côte Est. Déterminés à reprendre l’activité depuis le mois d’août, les prestataires de Hienghène constatent avec inquiétude et impuissants, que les voyageurs continuent de déserter la commune, pourtant calme et accessible, en cette période de vacances scolaires. En témoigne le taux de remplissage de l’hôtel Koulnoué, dérisoire. Reportage.

    Le bruit des vagues et le chant des oiseaux pour unique compagnie. Depuis cinq mois, le Koulnoué est plongé dans une torpeur dont il ne parvient pas à se sortir. Piscine, bar, restaurant, jardins… En ce jour de vacances scolaires, l’hôtel est littéralement désert, signe que les visiteurs n’ont pas encore fait leur retour dans la commune. Une léthargie synonyme de "tristesse" pour l’équipe encore en place au sein de l’établissement. "Après la période terrible de la Covid, particulièrement longue à Hienghène, nous avions enfin retrouvé un rythme de croisière l’an dernier. Pour 2024, nous étions quasiment pleins jusqu’en décembre et nous devions faire une excellente année. Mais avec le 13 mai, l’hôtel s’est vidé en deux jours", explique, amère, la direction, qui a tout de même décidé de rouvrir cet hôtel emblématique, depuis les vacances d’août. Un "test" qui "n’a pas donné grand-chose", avec un taux de remplissage dérisoire de 2 à 3 % en moyenne.

    "Un gros sentiment d’injustice"

    En clair, entre une et trois chambres sont en général occupées dans cet hôtel d’une capacité de soixante clefs. Une clientèle pour l’heure essentiellement constituée de professionnels en déplacement dans la région. "Nous éprouvons un gros sentiment d’injustice car ici, c’est très calme. Il n’y a pas eu de violences", poursuit la direction, qui ne s’avoue pas vaincue. En particulier depuis la Foire du Pacifique, au cours de laquelle l’hôtel a engendré une soixantaine de réservations valables sur une période d’un an.

    "Cela montre qu’on n’est pas boycottés par des gens qui veulent toujours nous voir. Désormais, le vrai challenge, c’est que ces personnes retrouvent un sentiment de sécurité sur la route pour oser venir mais aussi qu’elles aient une sécurité financière, sans avoir peur de perdre leur travail demain", estime l’équipe dirigeante, pour qui la reprise devrait être "très lente" et plutôt attendue pour 2025.


    Seuls cinq des quarante salariés que compte l’hôtel Koulouné sont encore en poste. Les autres sont placés au chômage partiel. Photo Anthony Tejero

    D’ici-là, l’avenir reste on ne peut plus incertain pour les 35 salariés (sur un effectif total de 40) placés au chômage partiel. "Si ce dispositif s’arrête, nous serons obligés d’envisager un plan social, confirme la direction du Koulnoué, deuxième employeur de la commune, après la mairie. Quand l’hôtel est rempli, tous les prestataires marchent bien, quand il est vide comme aujourd’hui, tout le secteur est en souffrance."

    "Je n’ai jamais connu ça"

    Hébergements, structures de loisirs, snacks… L’ensemble des acteurs économiques de Hienghène, essentiellement tournés vers le tourisme, subit de plein fouet les conséquences de cette crise inédite. Une situation qui, si elle perdure, risque de plonger de nombreuses familles dans une grande précarité. "Depuis que je me suis lancé en 2015, je n’ai jamais connu ça. Et je sens que ça va encore durer", craint Bruno Bouaoui, qui propose des excursions en mer autour de la Poule et vers les îlots environnants. Alors qu’il effectue habituellement jusqu’à quinze sorties en bateau par semaine, le gérant de la société Daalik Houleyo, dont le carnet de réservations était bien rempli, n’est sorti qu’une seule fois depuis le 13 mai.

    "C’est impossible de payer les traites"

    "Je n’ai aucune visibilité. J’aurai peut-être d’autres clients pour le week-end du 1er novembre, mais cela reste à confirmer car les gens ont encore peur de monter depuis le Sud, même si ici, c’est sûr, confirme ce père de famille de la tribu de Lindéralique, contraint de demander un report d’échéances de son crédit contracté pour démarrer son activité. Aujourd’hui, c’est impossible de payer les traites car on doit aussi régler les charges comme le Ruamm et l’assurance. À Hienghène, on est entièrement dépendants du tourisme, donc c’est très difficile pour tout le monde, jusqu’aux gens qui tiennent les marchés de bord de route. Du coup, on se débrouille comme un peu. On fait un peu de pêche pour faire tourner le bateau et on est obligés de tous reprendre le champ. Il n’y a plus le choix".


    À la base nautique, qui parvient à maintenir un minimum d’activité grâce aux séances scolaires avec le collège voisin, les premiers visiteurs n’ont refait leur apparition que ce samedi 12 octobre. Photo Anthony Tejero

    Pourtant, Bruno non plus ne baisse pas les bras. "On a de gros trous dans la comptabilité, mais on y croit. On est toujours là, prêts à accueillir les visiteurs. En attendant, on essaie de s’encourager entre nous, confie ce navigateur, qui en profite pour passer un message aux élus. C’est aux politiques de trouver une solution maintenant, quitte à mettre leur orgueil de côté, pour que tout le monde puisse de nouveau travailler."

    "On reste positifs, on veut que les gens reviennent"


    Astride, accueille les visiteurs à l’office de tourisme, situé dans le village de Hienghène.

    Depuis le mois de juin, l’office de tourisme de Hienghène a repris du service, notamment pour gérer les annulations en cascade de réservations. Si la reprise est loin d’être acquise (avec trois visiteurs en septembre contre une quinzaine par jour en moyenne), Astride sent néanmoins un premier sursaut depuis la Foire du Pacifique où la commune a répondu présent. "Les gens étaient contents de nous voir et on voit qu’il y a un désir de revenir. Depuis quelques jours, on commence à avoir des appels notamment pour les gîtes, les accueils en tribu et les activités durant les prochaines grandes vacances, assure l’agent d’accueil de l’office, qui le martèle : Les routes sont de nouveau accessibles, il n’y a pas de barrage et on espère que le bouche à oreille des premiers visiteurs va faire son effet. Nous avons mené, en amont, une tournée de l’ensemble des prestataires avec les chefs de tribu et tout le monde est prêt à accueillir les touristes partout."

    Si ces professionnels ont conscience que la reprise "va prendre du temps", tous restent "positifs". "On est motivés et on veut que les gens reviennent, qu’ils soient contents de retourner dans le Nord, car nous, on sera très heureux de les revoir", insiste Astride, qui estime que Hienghène a toujours eu "le sens de l’accueil". "On est impatients. Recevoir des visiteurs, des gens qui viennent d’ailleurs, ça fait également du bien à la population et au moral. Ça marque un certain retour à la normale pour tout le monde."

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