- Propos recueillis par Anthony Tejero | Crée le 24.12.2024 à 09h37 | Mis à jour le 24.12.2024 à 09h37ImprimerL’ancien député et membre de Calédonie ensemble, Philippe Dunoyer, a présenté cet amendement, lundi soir, au Congrès, qui n’a fait l’objet d’aucun débat avant d’être voté à l’unanimité. Photo A.T.Le groupe Calédonie ensemble a porté, ce lundi soir, un amendement surprise, voté à l’unanimité des membres du Congrès afin d’étendre le dispositif du chômage partiel, qui devait prendre fin au 31 décembre, jusqu’au 30 juin prochain. Une manière de faire pression sur l’État afin d’obtenir les financements nécessaires et soutenir les 15 000 Calédoniens qui bénéficient encore de ce dispositif. Entretien avec Philippe Dunoyer, porteur de ce texte.
Votre groupe au Congrès a proposé ce lundi soir un amendement de dernière minute, voté à l’unanimité, pour étendre la durée du chômage partiel jusqu’au 30 juin. Pourquoi ?
C’est une impérieuse nécessité parce qu’on est le 23 décembre, que dans huit jours, le dispositif du chômage partiel spécifique s’arrête. Ce n’est pas possible d’annoncer à 15 000 personnes et à leurs familles qu’à compter du mois de janvier, elles et leurs entreprises ne seront plus accompagnées. Pourquoi ? Parce que l’économie n’est pas repartie, parce que les entreprises essaient toujours de survivre, pour la plupart d’entre elles, et que si on n’a plus ce mécanisme qui permet de financer aujourd’hui 70 % du salaire des personnes concernées, des sociétés vont licencier. D’ailleurs, plusieurs centaines d’entre elles ont déjà commencé des démarches de licenciement économique à l’approche de cette fin d’année. Ces procédures concernent déjà 3 000 personnes de plus.
Il y a une urgence et il y a une unanimité pour considérer que le 31 décembre ne peut pas être la deadline. Malheureusement, les représentants de l’État qui se sont succédé en Nouvelle-Calédonie n’ont pas changé d’un iota leur position et ont toujours dit qu’au 31 décembre cela s’arrête.
En quoi cet amendement change-t-il la donne ?
À travers cet amendement qui vient d’être adopté à l’unanimité, on prolonge le texte qui crée ce mécanisme spécifique jusqu’au 30 juin, premièrement. Ensuite, on dit pour les personnes concernées qu’à compter du 1er janvier 2025, elles auront droit à 60 % de leur rémunération nette jusqu’à deux fois le SMG (salaire minimum garanti) contre actuellement 70 % du salaire brut dans la limite de 2,5 SMG. C’est donc un peu moins qu’aujourd’hui. C’est la condition pour les six mois à venir. Cela fera un coût un peu moins élevé, ou peut-être moins élevé pour l’État, sans pour autant que cela plonge ces 15 000 personnes dans la difficulté si elles étaient au chômage total, dont le montant est de seulement 75 % du SMG.
Pour autant, aucun financement de ce prolongement n’a encore été acté. Est-ce un moyen de faire pression sur l’État ?
Oui. Derrière ces amendements juridiques et politiques, il y a un message qui est envoyé à l’État. Le même message que depuis plusieurs mois, mais là on a quand même tous les groupes politiques et l’Éveil océanien qui sont signataires. Calédonie ensemble avait écrit au Premier ministre en ce sens récemment, des présidents de collectivité et du gouvernement l’ont fait aussi. Donc tout le monde appelle l’État à trouver des financements. Il a en 2024, je le rappelle, consacré 23 milliards de francs CFP à ces mécanismes. Ça coûtera moins cher en 2025.
D’ici-là, à quoi doit-on s’attendre dès le 1er janvier sans ces financements ?
Grâce à un décalage, il se trouve que les entreprises mettent un à deux mois à envoyer leurs demandes de remboursement, la Cafat va donc disposer d’un matelas qui lui permet de tenir en janvier, voire jusqu’au mois de février. Cela va nous permettre donc non seulement de relancer l’État, bien entendu, mais de relancer également le nouveau Premier ministre (François Bayrou), son gouvernement, et d’attendre soit le projet de loi de finances 2025 pour avoir un financement dédié, soit d’avoir une avance remboursable, parce que je rappelle qu’on n’est pas obligé de faire passer tous les financements par un budget.
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En quoi, est-ce important que ce chômage spécifique ne soit pas abandonné selon vous, alors qu’on connaît les difficultés financières que traverse actuellement la France ?
D’abord, je note qu’avant la chute du gouvernement de Michel Barnier, il était déjà annoncé jusqu’à 65 milliards de francs d’aides nouvelles, de prêt, en 2025. Là, ça ne va pas coûter 65 milliards. Parmi les dépenses qui sont des dépenses obligatoires, incontournables, incompressibles, il y a le chômage partiel. Il existait donc déjà une perspective de financement.
Si on ne prolonge pas ce dispositif, 15 000 personnes vont passer du chômage partiel au chômage total. Si elles ne sont pas accompagnées, beaucoup d’entreprises vont soit fermer leurs portes et licencier, soit réduire les salaires, soit embaucher à temps partiel. Et donc pour ces personnes, cela signifie une dégradation encore de leur niveau de revenus et de leur situation personnelle. Mais pour les entreprises, c’est aussi une double peine.
Parce que derrière, ce sont des consommateurs qui ont beaucoup moins à dépenser dans l’économie calédonienne. Et aujourd’hui, je le rappelle, l’économie tourne à 60 ou 70 %, et parfois à 50 % par rapport aux chiffres d’avant le mois de mai 2024. Donc on a besoin de cette consommation qui est le moteur de la croissance aujourd’hui. Si ces 15 000 personnes se retrouvent au chômage total ou licenciées, ce sera encore un coup très dur, et à mon avis, insupportable à la fois pour les familles et les entreprises.
Vous avez chiffré à 23 milliards le coût de ce dispositif en 2024. Quel montant pourrait atteindre son prolongement jusqu’au 30 juin ?
C’est difficile à dire parce que cela dépendra du nombre de personnes concernées. Pour l’instant, il y a une stabilité du nombre de personnes qui émargent au chômage partiel spécifique. Malheureusement, ce chiffre tourne à 15 000 depuis plusieurs mois.
Mais comme on baisse le niveau d’indemnisation et de prise en charge par la Cafat et donc d’accompagnement par l’État, cela coûtera moins, d’autant que les 23 milliards de francs portent quand même sur neuf mois, alors que là, on est sur une prolongation de six mois.
Mais en tout état de cause, quoi qu’il arrive, c’est une dépense obligatoire. Elle est prioritaire, et s’il faut faire des sacrifices sur d’autres dépenses, faisons-les car on ne peut pas sacrifier ces 15 000 personnes et leurs familles.
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