- Anthony Tejero | Crée le 27.11.2024 à 16h50 | Mis à jour le 27.11.2024 à 17h08ImprimerLe gouvernement de Louis Mapou a dressé le bilan de sa visite à Paris, face à la presse, ce mercredi, en présence de Yannick Slamet ; Christopher Gygès, Gilbert Tyuienon et Thierry Santa. Photo Anthony TejeroLe gouvernement de Louis Mapou a tiré, ce mercredi, le bilan de son déplacement à Paris, du 15 au 23 novembre dernier, où ses membres ont multiplié les rencontres au plus haut niveau de l’État, y compris avec Emmanuel Macron, pour s’assurer du soutien financier de la France alors que la Calédonie traverse une crise "historique". L'occasion également de présenter et discuter des orientations du PS2R, porté par l’exécutif.
Quel était le but de cette mission ?
Conduite par son président, Louis Mapou, aux côtés de Yannick Slamet, Gilbert Tyuienon, Christopher Gygès et Thierry Santa, la délégation du gouvernement qui s’est rendue à Paris visait déjà à montrer l’unité de l’exécutif quelle que soit la sensibilité politique des uns et des autres.
"Dans cette crise économique et sociale historique, le gouvernement apparaît comme un rocher, auquel s’accrocher dans cette tempête qui nous secoue. Et ce déplacement, tous ensemble, a été largement salué et très apprécié, annonce d’emblée Louis Mapou, qui résume l’objectif de cette mission : "discuter avec le gouvernement national" de l’urgence économique et budgétaire du Caillou et non pas "des autres aspects qui ne relèvent pas de notre compétence directe", à savoir les négociations sur l’avenir institutionnel.
Ces rencontres ont aussi été l’occasion de présenter en personne les grands axes du PS2R (le plan de sauvegarde, de refondation et de reconstruction) porté par l’exécutif "en phase de finalisation" pour "voir s’il y avait une bonne compréhension de l’État" et "pour discuter de ses modalités d’application", précise le chef du gouvernement.
Un plan qui doit permettre de dégager des économies à travers de nombreuses réformes en vue de "rééquilibrer les comptes sociaux tout en relançant la croissance", rappelle Christopher Gygès, pour qui l’unité du gouvernement collégial à ce sujet est essentielle : "Une telle mission avec des membres indépendantistes et non indépendantistes assis à la même table avec l’État, cela ne s’était pas vu depuis très longtemps. Être capables de porter tous ensemble ce plan est un gage de confiance pour l’avenir. C’est un bon signal envoyé tant à la Nouvelle-Calédonie qu’à l’État."
Quels sont les engagements de l’État ?
"Le soutien à la Nouvelle-Calédonie a été réitéré et confirmé, c’est le moins qu’on puisse dire. Il n’y a pas de question sur ce point-là", assure Louis Mapou, avant de rappeler les engagements de l’État, qui a déjà, depuis mai, débloqué 64 milliards de francs de financements, dont 55 milliards sous la forme d’emprunts et 9 milliards sous la forme de subventions.
Lors de cette mission, le Premier ministre Michel Barnier a annoncé par ailleurs un nouveau rehaussement du prêt garanti par l’État, qui passera ainsi de 770 millions à 1 milliard d’euros, soit un total de 120 milliards de francs. Cette garantie a ainsi été ajoutée au Projet de loi de finances (PLF) 2025 qui doit encore être validé au niveau national. Une enveloppe qui s’inscrit dans une convention triennale qui devra être présentée au Congrès lors du prochain débat d’orientation budgétaire, prévu fin décembre ou début janvier.
"Ne nous réjouissons pas trop pour autant. Un milliard d’euros, c’est énorme, mais ça nous permettra uniquement de fonctionner a minima et les réformes du PS2R seront nécessaires si on veut sortir la Nouvelle-Calédonie par le haut", juge bon de préciser Thierry Santa.
En attendant, les élus du Congrès seront d’abord invités à voter le 11 décembre, une tranche supplémentaire de 27 milliards de francs, pour tenir d’ici la fin de l’année. Une enveloppe cruciale pour permettre le versement de dotations aux collectivités, dont les provinces et les mairies "afin d’éviter la cessation de paiements qui leur pend au nez le mois prochain", insiste Gibert Tyuienon.
Pourquoi des prêts plutôt que des subventions ?
C’est le sujet qui divise et fait débat parmi les politiques dont certains, comme les membres du Rassemblement et de l’Éveil océanien, fustigent que le gouvernement se satisfasse de l’obtention de prêts en endettant le pays par des sommes "impossibles à rembourser", au lieu d’essayer de négocier des subventions, chose que la délégation transpartisane doit tenter cette semaine de réussir, à Paris.
Un débat qui n’a pas lieu d’être à en croire le gouvernement : "L’essentiel, c’est de trouver les bons montants face aux besoins, peu importe le véhicule employé : un prêt, une subvention ou autre, estime Christopher Gygès. On avait besoin en urgence d’un montant pour assurer a minima le fonctionnement des collectivités, des régimes sociaux, etc. Et, compte tenu de la situation financière actuelle de la France, le prêt était le moyen le plus rapide d’obtenir cet argent."
Pour autant le gouvernement l’assure, dans le cadre de la convention triennale (du moins si elle est validée par les élus au Congrès), "la transformation en subventions" de cet emprunt garanti par l'Etat interviendra progressivement "au fil des années et de l’instauration du PS2R".
Quant au taux d’endettement de la Nouvelle-Calédonie qui exploserait à 650 % selon certains groupes politiques, l’exécutif balaie d’un revers de main ce chiffre "totalement faux" et indique que ce taux passerait à 60 % pour une raison assez technique, à savoir "que l’intégralité du montant du prêt n’entre pas dans ce taux, qui ne comprend que le montant considéré à risque puisque dans ce genre de garantie, l’État se substitue à la Nouvelle-Calédonie en cas de défaillance".
Vers un prolongement du chômage partiel ?
C’est une question que se posent et qui inquiètent de nombreux Calédoniens : le dispositif de chômage partiel sera-t-il prolongé au-delà du 31 décembre ? "Probablement", laisse entendre le gouvernement, qui s’engage à faire des annonces "assez rapidement" sur le sujet, mais qui l’indique : "il devrait y avoir encore un bon reliquat de l’enveloppe dédiée qui permettra, pour le début d’année prochaine, de le financer". Toujours est-il, rien n’a été acté et les modalités du maintien de ce dispositif devront encore être débattues, notamment sur les taux perçus par les bénéficiaires.
Que se passe-t-il si le gouvernement de Michel Barnier tombe ?
Pour autant toutes ces annonces du gouvernement et ces engagements de l’État sont suspendus aux prochaines échéances politiques au niveau national. En clair, si le Premier ministre Michel Barnier est contraint pour faire voter ses budgets 2025 de passer en force par le 49.3, et qu’ensuite, une motion de censure est décidée par les parlementaires, son gouvernement tombera. Un scénario possible qui serait une très mauvaise nouvelle pour les Calédoniens puisque "tout ce dont nous avons parlé ne sera plus d’actualité", glisse dans un sourire crispé Louis Mapou. Autrement dit, retour à la case départ alors qu’il y a urgence pour le pays.
Qui la délégation a-t-elle rencontré ?
- Le Président de la République Emmanuel Macron, pendant 1h15, "qui nous a interrogés sur la situation politique dans une discussion très libre qui nous a beaucoup plue avec nos différentes visions", précise Louis Mapou.
- Le Premier ministre Michel Barnier
- Le ministre des Outre-mer François-Noël Buffet
- Le ministre du Budget Laurent Saint-Martin
- Le ministre de l'Économie et des finances Antoine Armand
- Le président du Sénat Gérard Larcher
- La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet
- Le préfigurateur délégué à la mission Nouvelle-Calédonie Emmanuel Moulin (actuellement en mission sur le Caillou) et l'ensemble des conseillers chargés du dossier calédonien auprès du premier ministre
- Les membres de la mission " Reconstruction de la Nouvelle-Calédonie "
- Les membres du comité interministériel de reconstruction industrielle (CIRI)
- Le directeur général de la Caisse des dépôts Éric Lombard
- La commission de régulation de l'énergie (CRE)
- L'Agence française de développement (AFD)
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