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    Nouvelle Calédonie
  • Baptiste Gouret | Crée le 18.06.2024 à 19h08 | Mis à jour le 18.06.2024 à 19h23
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    Des représentants de la société civile ont créé le collectif "Pays pour le dialogue" afin d’aller rencontrer et écouter les différentes communautés du pays et trouver des solutions pour sortir de la crise. Photo Baptiste Gouret
    Ils sont anthropologue, musicien, sociologue, enseignant, syndicaliste… Des figures de la société civile calédonienne ont fondé le collectif "Pays pour le dialogue" et vont aller entendre, partout sur le territoire, les doléances et les attentes de toutes les communautés dans l’espoir de les rassembler, seul moyen, selon eux, de rétablir la paix.

    Ils l’admettent sans difficulté : "On est tous différents autour de cette table." Dans l’enceinte nouméenne de l’Église protestante de Kanaky Nouvelle-Calédonie, c’est en effet un groupe hétérogène de représentants de la société civile qui s’est présenté face à la presse, ce mardi 18 juin, pour annoncer la création d’un nouveau collectif dénommé "Pays pour le dialogue". Une action "citoyenne" et "apolitique", assurent ses membres qui, bien qu’issus d’horizons différents, ont pour caractéristique commune d’être des visages familiers pour les Calédoniens. À l’image de l’ancien maire de Bourail et dirigeant de l’Union calédonienne, Taïeb Aïfa, de la présidente de l’APEH Catherine Poedi ou encore du syndicaliste Didier Guenant-Jeanson.

    Cinq semaines après le déclenchement d’une crise dans laquelle s’enfonce chaque jour un peu plus le pays, ils ont mis de côté leurs divergences pour tenter de remettre la Nouvelle-Calédonie "sur le chemin de concertation, de construction et de paix initié par les Accords de Matignon-Oudinot et de Nouméa", a déclaré le pasteur Var Kaemo, président de l’Église protestante, en lisant la déclaration signée par les 14 membres du collectif (lire plus loin).

    Écouter "absolument tout le monde"

    Il n’était pas question, ici, de formuler un énième appel à la paix. C’est bel et bien un travail de terrain que veut entamer le collectif dès ces prochains jours. "Nous allons aller à la rencontre des communautés et des forces vives du pays, à commencer par la jeunesse", a dévoilé le pasteur Var Kaemo. Une "mission du dialogue" qui visera avant tout à écouter "les doléances, les critiques, les attentes et les espoirs de tous". Un préalable essentiel, selon les membres du collectif, pour ramener la paix dans le pays. "Ce ne sont pas les forces de l’ordre qui vont la rétablir, assène Taïeb Aïfa. On est dans un pays de consensus et de tradition orale."

    Il faudra toutefois "ouvrir notre porte à absolument tout le monde dans une dimension d’écoute exceptionnelle et éviter d’entrer dans des logiques d’alliances ou de contre-pouvoirs", avertit Jean-Claude Becker, éducateur spécialisé et cofondateur du conseil de la jeunesse de la DDEC. Ainsi, le collectif a d’ores et déjà pris des contacts avec différents représentants, y compris de la CCAT. "Si on ne rencontre pas les gens de la CCAT, ça veut dire qu’on exclut la possibilité de savoir comment et pourquoi on en est arrivé là", abonde Taïeb Aïfa.

    L’exercice sera toutefois difficile, reconnaît pour sa part Alain Signor, enseignant et ancien chef d’établissement, très marqué par les exactions des dernières semaines. "J’irai au dialogue la boule au ventre. Je ne peux pas admettre qu’on brûle des écoles et mette 8 000 personnes au chômage. Donc ça va être difficile, mais je ne vois pas d’autres moyens de s’en sortir."

    Des représentants politiques "retranchés dans leurs camps"

    Il s’agira ensuite de "créer les conditions" d’un rapprochement entre des groupes a priori antagonistes, afin de retisser les "fils du dialogue aujourd’hui rompus" et construire "une véritable communauté de destin". "Il y a aujourd’hui beaucoup de personnes qui ne se parlent plus, ne se comprennent plus, mais on ne peut pas en rester à ce simple constat, juge Patrice Godin, anthropologue et enseignant-chercheur à l’UNC. On ne peut pas ne rien faire, notre but est de remettre les gens en relation. Ça va être difficile, mais y a-t-il une autre solution ? Et si on ne le fait pas, qui va le faire ?", interroge ce dernier, persuadé que la solution ne viendra que "de la population calédonienne elle-même". Le constat d’un échec des responsables politiques est en effet partagé par l’ensemble des membres du collectif "Pays pour le dialogue". "Ce sont les signataires de l’Accord de Nouméa, c’est-à-dire le FLNKS, les non-indépendantistes et l’État qui nous ont amenés à cette situation, accuse Didier Guenant-Jeanson, ancien secrétaire général de l’Usoenc. Il faut aujourd’hui reconnaître qu’il y a un certain nombre de sujets qu’ils n’ont pas traité ou mal traité en quarante ans. Et cela fait un certain temps maintenant qu’ils n’entendent plus rien ni personne. Ils sont retranchés dans leurs camps et posent des conditions à la discussion, nous ne voulons plus de ça."

    Et Taïeb Aïfa de conclure : "Nos représentants ne semblent plus en mesure de faire ce rapprochement, donc peut-être qu’un groupe de citoyens, en toute modestie, pourra y parvenir."

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