- Outremers360 | Crée le 12.11.2024 à 11h23 | Mis à jour le 12.11.2024 à 11h23ImprimerLe buste de Pouvana’a a Opaa. Photo Tahiti HeritageÀ l’occasion de la fête de l’Armistice du 11 novembre, Titania Redon raconte l’histoire de deux engagés polynésiens du premier Bataillon du Pacifique. De Papeete à Marseille en passant par Nouméa, elle retrace le parcours de Pouvana’a a Oopa, son arrière-grand-oncle, et Edmond Peltzer, son arrière-grand-père. Récit de notre partenaire, Outremers360°.
On ne le dira jamais assez : l’engagement des militaires et volontaires de l’outre-mer dans les deux conflits mondiaux est peu (re) connu. Et pourtant : plus d’un millier de Tahitiens et de Calédoniens seront mobilisés ou s’engageront dans le bataillon des Tirailleurs du Pacifique pendant la Première Guerre mondiale. De par leur position stratégique, non loin des routes maritimes importantes pour le ravitaillement et le commerce des belligérants et la circulation des bateaux de guerre, les territoires français du Pacifique joueront un rôle non négligeable dans le conflit.
La ville de Papeete sous le feu allemand
En août 1914 lorsque le conflit éclate, il ne reste à Tahiti pour organiser la défense de l’île qu’une petite canonnière, la Zélée, et son équipage de cent hommes commandés par le lieutenant de vaisseau Maxime Destremau. Le 22 septembre, deux croiseurs de guerre allemands arrivent à l’entrée de la rade de Papeete qu’ils bombardent, entraînant l’incendie et la destruction de plusieurs bâtiments de la capitale. Leur objectif : s’emparer du stock de charbon de Papeete et se ravitailler en vivres. L’offensive échoue et les deux croiseurs mettent le cap vers les îles Marquises.
Départ des premiers contingents du Bataillon mixte du Pacifique
Une mobilisation partielle avait été décrétée en août 1914 dans les Établissements français d’Océanie (EFO, ancien nom de la Polynésie française). En mars 1915, un petit groupe est jugé apte et envoyé à Nouméa puis en France pour être intégré dans différentes unités. Plusieurs contingents sont partis de Tahiti à destination de Nouméa tout au long de l’année 1916. Mais la formation officielle du Bataillon Mixte du Pacifique date du jour de son embarquement à Nouméa, le 4 juin 1916 sur le vapeur Gange, à destination de la France. Il comprenait " deux compagnies composées de 600 tirailleurs natifs de Nouvelle-Calédonie et de Tahiti ".
Parmi ces engagés, Edmond Peltzer, mon arrière-grand-père que je ne connaîtrai qu’au travers de son livret militaire : né à Papeete en 1888, profession matelot. Il est mobilisé le 9 janvier 1916, embarqué à Papeete le 21 janvier (1er contingent), débarqué à Nouméa le 29 février 1916 et embarqué le 4 juin 1916 à bord du Gange. Débarqué à Marseille le 11 août, passé au camp de Fréjus pour le Bataillon mixte des tirailleurs du Pacifique le 21 mai 1917. Il reviendra de la guerre où il sera affecté dans la réserve du détachement d’infanterie coloniale à Papeete puis il s’établira à Huahine.
En avril 1917, devenu bataillon de marche, le Bataillon mixte du Pacifique (BMP) est renforcé de 500 Tahitiens et envoyé sur le front de Champagne. Fin octobre, il rejoint le sud de la France pour poursuivre son entraînement puis c’est de nouveau le front en juin 1918. En octobre 1918, le BMP reçoit pour mission de s’emparer de la ligne de tranchées nord de Vesles-et-Caumont. Vesles-et-Caumont est atteint et enlevé malgré une résistance acharnée de l’ennemi.
En tout, 1 079 soldats sont partis entre 1916 et 1917
Mon arrière-grand-oncle, le futur " Metua2 " de la Polynésie est né le 10 mai 1895 à Fare (Huahine) où il exerce la profession de charpentier. Natif des Îles-sous-le-Vent, alors sous le statut d’indigénat, il se porte volontaire et intègre la Compagnie d’infanterie coloniale de Nouvelle-Calédonie le 15 janvier 1917, matricule 1028, puis le Bataillon mixte du Pacifique le 16 février 1917. Il embarque sur le vapeur El Kantara le 10 novembre 1917 (4e contingent) à destination de la France. Il débarque à Marseille le 30 janvier 1918 et est affecté au Bataillon mixte du Pacifique le 16 février 1918. Le 7 juin 1918, il est à la 4e compagnie à Fréjus et rejoint le front le 9 juin 1918 à Pont-Sainte-Maxence dans l’Oise. Il est hospitalisé du 23 au 27 août 1918 et reviendra à Tahiti.
La stèle en hommage à Pouvana’a a Oopa inaugurée en juillet 2022 à la mairie de Huahine. Photo Fonds PeltzerLorsque la Seconde Guerre mondiale est déclarée, il participe au ralliement des EFO à la France libre tandis que son fils Marcel Marcantoni a Oopa s’engage dans le Bataillon du Pacifique. Marcel prendra part notamment à la bataille de Bir Hakheim puis au débarquement de Provence. Pouvana’a deviendra député puis sénateur de Polynésie, son fils Marcel Marcantoni a Oopa sera également élu à l’Assemblée nationale.
En tout ce sont 1 079 soldats qui partiront en 10 contingents entre 1916 et 1917 soit environ 1 100 soldats des EFO en tenant compte de ceux engagés en Métropole et des volontaires. 231 d’entre eux sont morts pour la France et sont inscrits sur le Monument aux morts situé avenue Pouvana’a Oopa, à Papeete.
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