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    Grand Nouméa
  • Anthony Tejero | Crée le 04.06.2024 à 16h07 | Mis à jour le 04.06.2024 à 19h11
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    Marc, un habitant de PK7 habitué du Café Mélanésien est ravi de retrouver cette boutique : "Je n’étais pas revenu dans Ducos depuis trois semaines. Ça me fait énormément de bien d’être ici. Personnellement, je m’évade avec la lecture en ce moment, mais re Photo Anthony Tejero
    Depuis quelques jours, bon nombre d'enseignes et de sociétés ont décidé de reprendre du service à Nouméa. Si cette réouverture "fait du bien au moral", l'activité n'en reste pas moins fortement ralentie et les inquiétudes demeurent profondes pour les mois à venir. Reportage à Ducos. 

    "Ça me fait tellement de bien au moral d’être ici et de retrouver nos clients. Cela m’évite de trop réfléchir." Au comptoir du Café Mélanésien, le large sourire de Maria n’a rien de forcé. Après avoir passé deux semaines " enfermée chez elle" dans le "quartier encore chaud" de Logicoop, cette salariée a repris le travail depuis la semaine dernière. Un soulagement pour la jeune femme. "Quand on voit toutes ces personnes qui ont tout perdu, on se sent chanceux de se lever le matin pour se rendre dans notre société qui est toujours debout."

    Trois semaines après le déclenchement des émeutes, la zone industrielle et commerciale de Ducos retrouve peu à peu son animation. Si les dégâts sont colossaux, avec des complexes entiers détruits par les flammes, l’activité a néanmoins repris dans la plupart des enseignes et des sociétés épargnées. Un semblant de retour à la normale aussi fragile que salvateur.

    "Montrer notre volonté d’aller de l’avant"

    "Nous avons rouvert depuis une semaine, uniquement parce que les forces de l’ordre ont nettoyé et sécurisé le secteur. Chez nous, la consigne est claire : au moindre risque physique ou matériel que court un employé, il reste chez lui, insiste Ludovic Turlin, le directeur de cette boutique de café. Revenir dans ce lieu familier qui est associé à du plaisir, ça nous fait autant de bien qu’à nos clients. C’est un retour vers une espèce de normalité. Rouvrir, c’est un signe fort pour montrer notre volonté d’aller de l’avant. Et quand on travaille, on est dans une dynamique de concentration qui nous permet de penser à autre chose qu’à ces tensions."


    Entre l’espace boutique et l’atelier de torréfaction, le Café mélanésien emploie dix salariés. Photo Anthony Tejero

    Changement de décor et d’ambiance dans cette enseigne de pièces détachées automobiles qui emploie 50 salariés pour qui "l’adaptation au jour le jour" est désormais le maître-mot, notamment ce mardi où certains employés de Païta et de Dumbéa n’ont pas pu venir à cause des barrages.

    "Chaque matin, j’arrive et je fais le point de qui peut être là ou non pour ensuite établir les équipes. C’est mon nouveau travail quotidien, explique le directeur, pour le moins inquiet quant au devenir de sa société. Les milliers de chômeurs causés par ces émeutes seront des consommateurs en moins et le pouvoir d’achat de la population va clairement baisser. Toutes les personnes qui se sont fait brûler et voler leur voiture sont également autant de clients en moins pour nous, comme pour les garagistes avec qui nous travaillons. Et au vu de toutes les concessions automobiles qui ont été détruites, la voiture est un produit qui va se raréfier. Les gens vont sans doute devoir attendre plusieurs mois avant de s’en procurer une, du moins pour ceux qui en auront encore les moyens."

    "Les six prochains mois seront très compliqués"

    Et ce n’est pas l’affluence enregistrée depuis la réouverture de l’enseigne, mardi dernier, qui a de quoi le rassurer. "On n'a réalisé que 50 % de l’activité habituelle après deux semaines d’arrêt. On a déjà fait une réunion avec le personnel pour leur dire : on attend fin juin pour établir un diagnostic. Mais on risque de se diriger vers un plan de licenciements économiques. On s’attend à ce que les six prochains mois soient très compliqués."


    Selon les commerçants, la fréquentation de la zone d’activités de Ducos a nettement repris depuis lundi. Photo Anthony Tejero

    Des craintes partagées par le gérant de ce grossiste en matériel électrique, qui a repris l’activité ce lundi et où le parking réservé à la clientèle reste désespérément vide. "Je pensais que ça redémarrerait plus vite", confie-t-il, conscient que l’année 2024 sera également "très difficile à passer" dans son secteur. "S’il y a un accord politique, on sera contents d’être là pour participer à la reconstruction. 2025 pourrait marquer la relance de notre filière, mais d’ici-là, ça va rester frileux. On est dans le flou complet. On ne peut rien prévoir. On vit au jour le jour. Mais ce qui est sûr, c’est que la rénovation et le secteur résidentiel vont fortement ralentir, notamment s’il y a des milliers de départs du pays. Et vu le climat social actuel, je ne suis pas très optimiste."


    Au Snack Maï Taï, les équipes proposent de nouveau à manger, mais ont réduit leur carte à deux plats et une salade de poissons, en raison des difficultés à s’approvisionner en produits frais. Cela n’empêche pas les habitués de revenir se restaurer sur place ou avec une barquette à emporter. Photo Anthony Tejero

    À quelques encablures de là, si ce n’est pas l’affluence des grands jours au snack Maï Taï, la bonne humeur est au rendez-vous en ce quatrième jour d’ouverture. "Les gens sont heureux de retrouver ce lieu d’échanges même si on ne va pas se mentir, on a tous le même sujet de discussion ! Ça fait du bien à tout le monde de voir l’activité reprendre et de pouvoir sortir de son quartier, estime Florent, le gérant de cet établissement qui n’a récupéré qu’un tiers de la fréquentation normale. On ne s’attend pas forcément à retrouver nos chiffres d’avant la crise, mais on sent bien cette réouverture. Comme beaucoup de snacks et restaurants ont malheureusement brûlé dans la zone, on pense qu’on parviendra à surmonter cette période morose. On croise les doigts et on essaie de rester positifs."

    Une reprise sous haute surveillance


    Les gendarmes mobiles restent mobilisés dans la zone, prêts à intervenir dans les plus brefs délais en cas d’incident.

    Les forces de l’ordre, pelotons de gendarmes mobiles en tête, restent stationnées sur les axes principaux de Ducos afin de sécuriser la zone tant pour les salariés que pour les clients.

    Du côté des professionnels, les dispositifs de sécurité sont désormais au cœur des préoccupations pour éviter de nouveaux pillages et incendies, qui ont déjà fait des ravages dans l’agglomération.

    Dans cette enseigne de pièces détachées automobiles, la direction a décidé de recruter un vigile en poste fixe toute la nuit depuis une dizaine de jours : "C’est un investissement essentiel aujourd’hui. Nous verrons au fil du temps comment adapter notre stratégie de gardiennage, peut-être en organisant une surveillance plus mobile que nous financerions avec d’autres enseignes de la zone, explique ce directeur. La problématique de la sécurité va rester centrale d’autant que la période qui s’ouvre demeure très incertaine sur le plan politique."

    À Ducos, comme dans de nombreuses autres zones d’activités, la surveillance des enseignes encore intactes s’est d’ailleurs organisée aux lendemains des premières émeutes. Depuis bientôt trois semaines, salariés, chefs d’entreprise et même riverains se relaient de jour comme de nuit pour monter la garde. C’est notamment le cas au snack Maï Taï : "Nous avons fait des veilles dès le 14 mai de jour comme de nuit. Et désormais, nous assurons 24 heures sur 24 une présence sur place", assure le gérant, qui précise que l’équipe a également décidé d’investir dans des caméras et un nouveau système d’alarme.

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