"Nous voulons dénoncer toutes ces incivilités et ces violences qui prennent aussi la forme de harcèlement scolaire et qui tendent à se banaliser et à prendre de l’ampleur en un clic sur internet". Désemparées face aux agressions d’élèves filmées puis diffusées sur les réseaux sociaux, plusieurs mères de famille ont décidé de manifester leur indignation, banderoles et pancartes en main, ce lundi, sur le rond-point situé en face du lycée Jules-Garnier, à Nouville. Un lieu qui ne doit rien au hasard.

"Un acte prémédité"

Ces femmes ont voulu soutenir un jeune garçon, frappé à plusieurs reprises, le lundi 29 avril devant l’entrée de cet établissement. Un acte prémédité, à en croire ces manifestantes proches de la victime, qui ont réussi à se fournir la vidéo de l’agression qui tourne sur Messenger.

"La personne qui filmait était déjà prête lorsque la vidéo commence, ce qui montre que c’était un acte prémédité. On y voit un jeune cagoulé arriver puis frapper à plusieurs reprises cet élève devant de nombreux autres jeunes qui ne réagissent pas et regardent comme s’ils étaient habitués, décrivent, consternées, Mélissa et Saray. À travers notre action, nous voulons faire comprendre que ceux qui diffusent et partagent ces vidéos sur Internet sont tout autant coupables, du moins sur le plan moral. C’est tout sauf normal."

Interpeller les élèves et leurs parents

Cette mobilisation vise ainsi à sensibiliser et interpeller les jeunes "qui sont les citoyens de demain" ainsi que leurs familles, notamment celles de victimes "qui n’osent pas en parler". "C’est un véritable phénomène de société qui se produit dans tous les établissements scolaires et en dehors auquel nous devons faire face", estiment ces mamans, qui espèrent une prise de conscience collective sur le sujet et attendent des "réponses mieux adaptées" envers les victimes cibles de harcèlement, "pour qui les conséquences peuvent aller très loin et qui sont souvent contraintes de changer de lycée au détriment des agresseurs et des harceleurs."

Et ce ne sont pas ces adolescentes de 15 ans, qui discutent à la sortie de l’établissement, qui diront le contraire, tant elles sont habituées à ces scènes qu’elles jugent "normales" et même "banales". "On voit souvent des vidéos d’agression. Elles tournent beaucoup sur les groupes privés de Messenger et sur Instagram. Quand on les reçoit, évidemment qu’on clique pour les regarder, mais c’est moins drôle quand on ne connaît pas les personnes, confient, un brin blasées, Maëlys et Lysseka, qui jugent amusants ces contenus "tant qu’ils ne sont pas trop brutaux."

"C’est la honte pour les victimes"

Pour autant, ces jeunes femmes ont conscience des dérives que peut engendrer un tel phénomène. "Il faut faire preuve de plus d’empathie pour les victimes, défend Eloïse. C’est la honte pour elles que ces vidéos tournent partout sur Internet. Cela peut mener au harcèlement, mais aussi à des représailles de la part des familles et des proches qui vont venir pour se venger."

D’une manière générale, ces adolescentes s’accordent sur un point. "Lorsqu’on voit ces bagarres et agressions filmées, qui se font aussi entre filles, mieux vaut ne rien dire si on ne veut pas qu’il y ait des conséquences sur nous ensuite."