fbpx
    L Calédonie
  • Frédérique de Jode / L Calédonie | Crée le 07.09.2024 à 14h00 | Mis à jour le 07.09.2024 à 14h00
    Imprimer
    Selon une étude du Journal of behavorial science publiée en 2019, 66 % des femmes sont touchées par le syndrome de l’imposteur au moins une fois dans leur vie. Photo DR
    Ne pas se sentir légitime dans le domaine professionnel ou au sein de sa sphère personnelle et familiale, manquer de confiance en ses compétences… Si ces pensées deviennent obsessionnelles, il est possible que vous soyez victime du syndrome de l’imposteur. Un phénomène qui touche en majorité les femmes. Le point avec notre partenaire le magazine L Calédonie.

    " Le syndrome de l’imposteur n’est pas considéré comme une pathologie, souligne Grégoire Thibouville, psychologue. Il n’est d’ailleurs pas répertorié dans la nomenclature des troubles mentaux. " Le syndrome de l’imposteur a été mis en lumière en 1978 par Pauline Clance et Susanne Imes. Ces deux psychologues ont étudié 150 femmes diplômées, reconnues pour leurs compétences, qui exerçaient des métiers réputés. Or, ces femmes brillantes ne considéraient pas qu’elles avaient réussi.

    Le syndrome de l’imposteur est un sentiment de doute en sa personne et ses compétences, et qui persiste malgré les succès scolaires et professionnels. Il se manifeste principalement par le sentiment profond de ne pas mériter sa place, de se sentir illégitime et de tromper les autres en l’occupant. Il s’agit essentiellement d’un conflit entre la perception que l’on se fait des autres et la façon dont on se perçoit soi-même.

    Le syndrome de l’imposteur peut se développer très tôt vers l’âge de six ans, à l’entrée de l’école primaire.

    " La personne attribue ses succès à des facteurs extérieurs, à la chance et non pas à ses propres compétences, ses diplômes, son expérience ", précise Grégoire Thibouville. Quelles sont les causes de ce syndrome ? " Il y a la question des attentes parentales concernant les réussites professionnelles et sociales, soit elles sont trop faibles, soit trop élevées, ce qui peut entraîner chez certaines personnes ce syndrome ou le fait d’être né dans un milieu socio-économique inférieur face à la culture de l’élitisme, détaille le psychologue. C’est pourquoi le syndrome de l’imposteur peut se développer très tôt vers l’âge de six ans, à l’entrée de l’école primaire ".


    L Calédonie

    Manque de confiance

    Pâtissière de formation, Gabrielle Duval, a d’abord créé un laboratoire dans lequel elle confectionnait des gâteaux et des cupcakes à la commande. Puis, lauréate de l’émission télévisée Ose ta Boîte en 2020, elle ouvre, à l’âge de 23 ans, Madame Pâtisserie. " Le syndrome de l’imposteur est apparu dès que j’ai ouvert mon laboratoire, explique Gabrielle. Énoncer un prix aux clients me mettait mal à l’aise car j’avais cette impression que c’était trop cher. Ces réflexions m’ont suivie avec l’ouverture de la boutique, où j’ai également entendu que les prix étaient onéreux alors que ce n’était que des gâteaux. Elles m’ont impactée. " Une situation qui l’a amenée à douter de sa légitimité et de ses compétences. " J’ai commencé par moments à dévaloriser mon travail, à me demander si mes gâteaux étaient bons, beaux car je suis quelqu’un de perfectionniste ", relève-t-elle. Le manque de confiance s’est révélé à certains moments dans sa vie, elle qui a évolué dans un métier assez masculin où il fallait déjà trouver sa place. Aujourd’hui, à 27 ans, Gabrielle a pris du recul sur cette expérience et se sent plus sereine et peut se rendre compte du chemin parcouru sur un plan professionnel.

    Profils

    Comme Gabrielle, Anna* est perfectionniste, un trait de personnalité qui lui impose de viser l’excellence sans pour autant l’atteindre. " Depuis mes études au lycée, je voulais être journaliste et faire Sciences-Po, une école prestigieuse pour moi, souligne Anna. J’ai passé trois fois le concours pour entrer en première année et une fois pour rentrer en deuxième année, après des études à l’université, mais à chaque fois j’ai échoué. " Un échec marquant qui ne l’a tout de même pas empêchée de travailler dans le milieu des médias. " Je n’ai pas fait finalement d’études de journalisme, donc pas de diplôme. J’ai commencé à piger pour différents magazines. Dans la mesure où j’avais une exigence en matière d’écriture, j’adorais lire certaines plumes dans la presse, je ne me sentais pas à la hauteur, pas légitime. Je trouvais que je n’avais pas un style qui se démarquait. Ce fut parfois un frein dans ma carrière professionnelle. "


    Photo DR

    Sur le profil des personnes les plus sujettes à ce syndrome, Grégoire Thibouville en voit deux : les perfectionnistes et les autodidactes sans diplômes. " Mais, comme on l’a vu, on peut le développer même en étant diplômé (e) et auprès de personnes qui vont vite gravir les échelons. Ce que je perçois, c’est qu’ici il y a des ascensions professionnelles rapides car on facilite la réussite mais parfois elle peut faire peur. "

    Quoi qu’il en soit, le syndrome de l’imposteur provoque des réactions disproportionnées. Par peur d’être démasquées, les victimes se réfugient dans un travail acharné jusqu’à s’épuiser, risquer un burn-out ou une dépression, ce qui renforce leur sentiment d’incompétence. D’autres se découragent, sous-estimant leurs capacités et tombent dans la procrastination. " On constate que les hommes auront tendance à agir alors que les femmes vont être plutôt inhibées, en retrait ", relève Grégoire Thibouville.

    Les femmes plus concernées

    Les genres ne sont pas égaux face à la dévalorisation de soi. Une étude publiée par le Journal of Behavioral Science en 2019, estime que le syndrome de l’imposteur touche 56 % des hommes et 66 % des femmes, au moins une fois au cours de leur vie. " Ce sont des stéréotypes qui perdurent, le poids d’un héritage sociétal, appuie Grégoire Thibouville. On enferme les filles dans certains emplois et, encore aujourd’hui, malheureusement, les femmes s’interdisent de faire des grandes études et restent sous-représentées aux postes de responsabilités et de leadership. Plus les femmes se retrouvent dans des fonctions élevées, de façon légitime, plus elles sont persuadées de ne pas l’être car on les a formatées, conditionnées et à ne pas être à ce poste-là. "


    La Une du magazine L Calédonie de mai 2024. Photo Cissia Schippers

    Comment dépasse-t-on ce syndrome ? " Cela peut passer par la reconnaissance de sa hiérarchie, de ses collègues, par l’expérience que l’on acquière au fil du temps, par les proches qui nous encouragent, explique Grégoire Thibouville. Si le syndrome persiste, qu’il véhicule une trop grande anxiété, qu’il est handicapant, il faut se faire aider par un professionnel. "

    * Prénom d’emprunt

    Note

    Retrouvez les infos de L Calédonie sur sa page Facebook. Le magazine, sorti en juin et non en mai en raison des émeutes, est toujours disponible dans les points de vente suivants : Librairie Michel-Ange, Librairie Port Plaisance, Libraire Quartier-Latin, Tabac centre Belle-Vie, Tabac Dumbéa Mall, Tabac Géant Sainte-Marie, Tabac presse Moana.

    MERCI DE VOUS IDENTIFIER
    X

    Vous devez avoir un compte en ligne sur le site des Nouvelles Calédoniennes pour pouvoir acheter du contenu. Veuillez vous connecter.

    J'AI DÉJA UN COMPTE
    Saisissez votre nom d'utilisateur pour LNC.nc | Les Nouvelles Calédoniennes
    Saisissez le mot de passe correspondant à votre nom d'utilisateur.
    JE N'AI PAS DE COMPTE

    Vous avez besoin d'aide ? Vous souhaitez vous abonner, mais vous n'avez pas de carte bancaire ?
    Prenez contact directement avec le service abonnement au (+687) 27 09 65 ou en envoyant un e-mail au service abonnement.
  • DANS LA MÊME RUBRIQUE
  • VOS RÉACTIONS