- Charlie Réné et Camille Tyrou | Crée le 07.08.2018 à 06h04 | Mis à jour le 07.08.2018 à 07h13ImprimerChez Mivi (à gauche) comme chez Tennessee Farm (à droite et en bas) les visiteurs sont au plus près des employés de l’usine pour comprendre leur travail. J-A.G-L / C.RPortes ouvertes dans les usines locales de transformation pour la sixième édition de la Semaine de l’Industrie. Pour la Finc, il s’agit de faire connaître le secteur, particulièrement auprès des jeunes.
Difficile de s’entendre, hier matin, dans le dock de l’entreprise Mivi, à Ducos. Pourtant entre le bruit des coupeuses ou celui de la sableuse à verre, plusieurs petits groupes d’élèves de terminale, venus découvrir la miroiterie - vitrerie tendent studieusement l’oreille. Poste par poste, machine par machine, Valérie Jeandin détaille, au travers de l’atelier, les procédés de fabrication, les différents types de produits, vantant la position de « leader » de cette « entreprise familiale » qui produit 30 000 à 40 000 mètres carrés de verre de construction et d’aménagement par an.
Une opération communication, cette visite, programmée dans le cadre de la Semaine de l’industrie ? « C’est important d’ouvrir nos portes, de montrer aux gens qu’ils peuvent nous faire confiance, admet la gérante, qui insiste sur le fait que l’entreprise, qui ne bénéficie pas de protection de marché doit « innover, se renouveler et se battre » pour survivre. Mais accueillir des classes c’est aussi une manière pour nous de susciter des vocations chez les jeunes ». Car dans l’industrie manufacturière, la transmission permanente des savoir-faire est une « nécessité ». La matinée semble être, de ce point de vue, une réussite : parmi les lycéens, tous en filière technologique, les regards sont curieux et les questions fusent. Entre autres sur les métiers porteurs.
Certains produits qu’on croit importés sont fabriqués ici.
DU BTP AU CHOCOLAT
Changement de décor. Au même moment, au 6e Kilomètre, c’est dans un cadre moins bruyant et dans d’agréables effluves cacaotés qu’une classe de troisième de Portes-de-Fer visite la laiterie Tennessee Farm. En face de l’usine où sont produits les yaourts et autres fromages blancs, c’est surtout la chocolaterie, où sont confectionnées les tablettes Lapita ou les barres Nestlé, qui retient l’attention. « Au total, on produit 720 kg de chocolat par jour », précise Ginette Caihe, qui mène la visite. « Bien sûr, on parle des produits, des nouveautés, on sait que les jeunes font partie de notre clientèle, confie la superviseuse de production. Mais pour nous c’est surtout l’occasion de montrer que certains produits qu’on croit importés sont en fait fabriqués ici. Et que la production locale, elle fait travailler beaucoup de gens, comme moi, comme ceux qu’on rencontre dans l’usine… » L’emploi est donc là aussi au centre des échanges. Si les questions sont rares, les collégiens, en section Segpa*, ont bien noté que leur hôte est prêt à accueillir des stages découverte. « Ce sont des jeunes qui vont sûrement se diriger vers un CAP, et qui seront sur le marché de l’emploi d’ici deux ou trois ans, précise Jacques, professeur de vente de la classe. C’est important qu’ils puissent avoir une vision de ce genre d’entreprise. Ça peut représenter des opportunités. »
GRANDS DÉBATS À VENIR
Promouvoir et informer. Voilà donc les deux vocations de cette Semaine de l’industrie, que la Finc s’efforce d’organiser chaque année depuis maintenant six ans. « Cela plaît particulièrement aux scolaires », note-ton à la Fédération de l’industrie. Côté entreprises, on reconnaît aisément que ce genre d’opération est nécessaire pour valoriser l’image de la production locale, « longtemps dévalorisée par rapport à l’international ». Mais l’heure n’est pas au débat, la semaine se veut « positive ». Comme une envie de légèreté dans une actualité lourde : TGC, réglementation des prix et réforme des protections de marché à venir. « Un programme chargé ».
*Sections d’enseigne
L’industrie peut créer beaucoup d’autres emplois
XAVIER BENOIST, PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION DE L’INDUSTRIE DE NOUVELLECALÉDONIE FINC
Après plusieurs années de ralentissement économique, l’industrie a-t-elle trouvé un réel rebond ?
Nous avons des réalités très diverses en fonction des filières : dans le numérique, on a une forte croissance qui se confirme d’année en année, alors que dans certains secteurs industriels, comme ceux qui sont liés au BTP, on a une baisse significative, des entreprises qui souffrent… Au global, le nombre d’emplois industriels a légèrement baissé sur la dernière année. Même si certains s’en sortent bien, on est loin du rebond généralisé. La plupart des industriels, en tant qu’acteurs économiques, sont dans une position d’attente.
En simplifiant à l’extrême, l’industrie de transformation va perdre environ 10% de compétitivité par rapport à l’importation avec la mise en place de la TGC.
D’attente vis-à-vis des échéances institutionnelles ?
Je ne suis pas certain que ce sont celles qui vont avoir le plus d’impact. En revanche, la TGC au 1er octobre est une réforme complexe pour l’industrie, d’autant plus qu’on ne dispose pas de tous les éléments dont on a besoin pour l’aborder. L’attente, c’est celle d’une vraie stratégie de développement industriel que nous appelons, peut-être pompeusement, « code de l’industrie ». On sait que si on met en place une politique d’accompagnement claire par la puissance publique, une boîte à outils efficace, l’industrie de transformation qui est un des secteurs les plus significatifs en termes d’emploi, a le potentiel pour en créer beaucoup d’autres.
Par la fiscalité ou les protections de marché, la production locale est déjà soutenue…
Il y a des outils, mais l’idée de cette stratégie, c’est d’en reprendre ou d’en moderniser certains - la défiscalisation locale, le dispositif de protection de marché, le fameux crédit d’impôt à l’export -, et d’en étudier d’autres, en matière d’abattement de charges sociales, d’accompagnement pour acquérir le foncier… C’est d’ailleurs ce qui est prévu dans l’agenda partagé, puisqu’on sait que la TGC va mécaniquement aboutir à une perte de compétitivité. Nous allons présenter un rapport détaillé sur le sujet. En simplifiant à l’extrême, l’industrie de transformation va perdre environ 10% de compétitivité par rapport à l’importation avec cette réforme. Les outils promis pour compenser cette perte ne sont aujourd’hui pas là.
Sur les protections de marché, craignezvous l’avis de l’Autorité de la concurrence, qui a montré une certaine méfiance à l’égard de ces dispositifs ?
Ça serait un comble que la Finc craigne les avis de l’Autorité de la concurrence. On a appelé cet organisme de nos voeux, notamment pour qu’il se positionne sur les questions d’abus de position dominante. Après, on sait qu’il y a un apprentissage mutuel à faire. Nous, on apprend comment l’autorité fonctionne, et l’autorité, elle, apprend comment fonctionne l’économie calédonienne. Pour l’instant, elle a rappelé certains dogmes, liés à la régulation du marché uniquement par la concurrence. Mais la Calédonie a fait le choix de donner des avantages concurrentiels à ses industries de transformation, pour développer un tissu industriel, avoir de la production locale, fixer de l’emploi, de la valeur ajoutée… C’est un modèle atypique mais qui a porté des fruits : le tissu industriel calédonien est une exception dans l’outre-mer français.
Quoi qu’il arrive, une réforme des protections de marché est prévue…
Oui, l’idée c’est de moderniser l’outil et de l’inscrire dans une loi du pays et non plus dans une délibération comme c’est le cas aujourd’hui. Cette réforme a été inscrite dans les deux derniers discours de politique générale… Et on l’attend avec impatience.
Répères
Encore des places disponibles
Lancée hier, la Semaine de l’industrie, synonyme de portes ouvertes dans les entreprises, s’étalera jusqu’à vendredi. Après six éditions, le succès de l’événement organisé par la Fédération des industries de Nouvelle-Calédonie (Finc) ne se dément pas : sur 900 places de visites, seules 200 sont encore disponibles. L’agroalimentaire, et ses marques bien connues du grand public, a sans surprise été pris d’assaut en premier. Mais beaucoup de créneaux sont toujours accessibles. Réservations sur Finc.nc/semaineindustrie
La réglementation des prix
Comme le Medef ou la CPME, dont elle est adhérente, la Finc voit d’un mauvais oeil le projet de réglementation des marges et des prix qui doit accompagner la TGC. « On n’arrive pas à identifier comment elle peut s’appliquer à l’industrie de transformation puisqu’elle utilise un vocable inapplicable à l’industrie, explique Xavier Benoist. Notre recommandation, c’est de retirer le terme de producteur du projet. »
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