- Esther Cunéo esther.cuneo@lnc.nc | Crée le 04.09.2018 à 06h18 | Mis à jour le 04.09.2018 à 11h15Face à un tourisme « vieillissant » confronté à de « vives concurrences internationales », un rapport sur la promotion du tourisme durable en outre-mer, produit par le Cese national, invite les collectivités ultramarines à mettre « l’identité culturelle » et la « richesse de la biodiversité » au coeur de leur nouvelle stratégie.
« Usé ». « Dépassé ». « Insatisfaisant ». Intitulé « promouvoir le tourisme durable en outre-mer », un rapport du Cese national souligne le modèle touristique des Dom- Tom, pour beaucoup, trop « confiné » aux plaisirs de la plage. Moins souvent citée que ses homologues, comme la Polynésie ou les Antilles, la Nouvelle-Calédonie accueille cependant jusqu’à jeudi, une délégation du conseil national, dans le cadre de la présentation de ses travaux. L’occasion pour les experts de se rendre compte du potentiel du Caillou. Et pour le pays, de s’inspirer de quelques suggestions, afin de « réinventer » un « autre tourisme », plus durable.
Stratégies de niche
Construit dans les années 70, le « créneau du balnéaire tropical » a vieilli, se heurtant dès la fin des années 1990, à une concurrence « féroce ». Plus proches, moins coûteuses, « de nouvelles destinations s’imposent sur la scène internationale, comme Cuba et la République Dominicaine » indique le rapport, invitant les territoires ultramarins à s’inscrire plutôt dans des « stratégies de niche », à l’instar du tourisme bleu. Avec un accent sur les activités nautiques, « peu diversifiées ». Ou du patrimoine culturel, « facteur important du maintien de la diversité face à la mondialisation croissante. »
Le trio « sable fin, soleil, cocotiers »
La Nouvelle-Calédonie, et ses 120 699 touristes en 2017, se situe à la sixième place du classement, sur les onze destinations françaises ultramarines. Soit un rang derrière son traditionnel challenger, la Polynésie française et ses 192 495 voyageurs. « Entre la Calédonie qui évoque les Evénements, et la Polynésie qui évoque les fleurs, le choix est vite fait » ironise Daniel Cornaille, président du Cese. Un déficit de notoriété ? Pas forcément note le rapport (lire repères). Plus une question « d’assimilation de l’offre touristique à quelques images très restrictives par rapport à la diversité de l’offre disponible. » Ainsi, d’autres centres d’intérêt que le trio classique « sable fin, soleil, cocotiers, » mériteraient largement d’être valorisés, relève le Cese. « Pour gagner en compétitivité, les outre-mer devraient davantage miser sur la différenciation de leur offre touristique, » indique le conseil, préconisant de « mettre l’identité culturelle et la richesse de la biodiversité des territoires au coeur de leur stratégie, portée par une véritable politique de recherche. »
Déconcentrer l’activité touristique
Comme la Guyane, et la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie s’étend sur une superficie importante, mais son activité touristique a tendance à se concentrer en quelques endroits. Le Sud pour le Caillou. Bora Bora, et Moorea, pour la Polynésie. Deux îles qui absorbent les deux tiers des touristes. Le Cese recommande ainsi « la dispersion de l’offre d’hébergement sur l’ensemble du territoire et sa répartition sur plusieurs types d’hébergement ».
Intégrer une dimension durable à la formation
Le Cese s’est longuement attardé sur le chapitre de la formation aux métiers du tourisme, et sur l’importance d’y incorporer la notion de développement durable. « Les diplômes de l’hôtellerie-restauration doivent intégrer dorénavant les questions des circuits d’approvisionnement, de la saisonnalité, de l’utilisation et de la valorisation des ressources locales mais aussi de la gestion des déchets, de l’eau, de l’énergie, etc. » énumère le Cese. Questions d’autant plus importantes en Nouvelle-Calédonie, où la majorité des produits agroalimentaires sont importés. Le plus souvent, de très loin. « Vendre la destination “île” ne doit pas se résumer à vendre l’île sous sa forme symbolique “soleil, sable fin, mer” en passant à côté du territoire, justifie le rapport. Il s’agit de donner du contenu pédagogique à la notion de territoire. »
La « nécessaire implication » des populations
Sans surprise, le Cese met l’accent sur le nécessité « d’emporter l’adhésion des populations ». En effet, si le tourisme est « respectueux de l’environnement, des cultures locales, moins invasif en termes de nombre de touristes, et pourvoyeur d’emplois », il est plus de chance d'être mieux accepté. Permettre aux Ultramarins d’être « touristes de leur propre territoire » et de « bénéficier des retombées économiques de ce secteur, » c’est aussi « contribuer à la diffusion d’une culture d’ouverture aux touristes. »
L’outre-mer est à l’avant-poste du réchauffement
INÈS BOUCHAUT CHOISY, PRÉSIDENTE DU GROUPE DES OUTREMER AU SEIN DU CESE NATIONAL
Les Nouvelles calédoniennes : Pourquoi avez-vous choisi la Nouvelle-Calédonie pour présenter cette étude sur le tourisme durable dans les outremer ?
Nous avions rencontré les membres du Cese de Nouvelle-Calédonie en mai 2018 et nous avions pu échanger sur le tourisme. Il nous est apparu important de nous déplacer pour présenter cet avis. Je suis originaire de Saint-Barthélemy et nous avons fait le déplacement à Saint-Barth et Saint-Martin qui sont deux territoires frappés par le terrible ouragan Irma, et à Saint- Martin se pose réellement le problème du tourisme durable. J’avais eu l’occasion de voir à Paris un reportage sur Déva, le montage du projet et la participation des habitants. Ce bel exemple m’a interpellée et motivée à venir rencontrer les différents acteurs du tourisme en Calédonie.
Qu’est-ce qui caractérise le tourisme durable par rapport à une activité touristique moins réfléchie ?
C’est un tourisme qui tient compte de ses impacts économiques, sociaux et environnementaux actuels et futurs, mais qui tient compte aussi des attentes des visiteurs et des besoins des populations d’accueil.
Vous avez encore toute latitude pour faire les bons choix
Votre étude pointe un modèle touristique balnéaire dont vous dites qu’il a atteint ses limites.
Ce n’est pas tout à fait ça. Plusieurs organisations ont fait le constat que le tourisme balnéaire tel qu’il a été porté par les pouvoirs publics pendant plusieurs décennies a atteint ses limites dans de nombreuses régions du monde. Il faut donc penser d’autres modèles plus adaptés aux populations et à l’environnement. Les territoires d’outre-mer sont aux avant-postes du réchauffement climatique et nous ne pouvons plus miser uniquement sur le balnéaire.
En quoi le tourisme balnéaire serait moins durable que le tourisme vert par exemple ?
Il n’est pas forcément moins durable. Mais dans de nombreux territoires, le tourisme balnéaire a atteint ses limites et pour ces territoires, il faut réfléchir à d’autres modes de développement.
La Nouvelle-Calédonie souffre d’un certain éloignement des grands bassins de population. Quels peuvent être les moyens de compenser ce handicap ?
Je vois surtout que vous avez une chance inouïe. La Nouvelle-Calédonie est vaste, elle est magnifique, elle n’est pas en surcharge. Vous avez donc la capacité de choisir la clientèle que vous souhaitez accueillir. Vous pouvez aussi réfléchir à la capacité de charge que vous êtes en mesure de supporter. Vous n’avez pas encore fait d’arbitrage, ce qui vous donne toute latitude pour faire effectuer les bons choix. Pourquoi ne pas avoir aujourd’hui un site pilote qui permettrait d’expérimenter les meilleures solutions ?
REPÈRES
1,1 million de croisiéristes
Secteur en plein essor dans le monde, le tourisme de croisière a gagné une place importante en Nouvelle- Calédonie, en Martinique et en Guadeloupe, regroupant à eux trois, 84% des croisiéristes qui débarquent dans les outre-mer. En 2016, les territoires ultramarins ont reçu au total 1,3million de croisiéristes. Portant la délégation à l’outre-mer à s’interroger « sur le modèle de développement durable mis en oeuvre dans ce secteur actuellement en expansion ».
Qui connaît le Caillou ?
Selon le sondage Harris interactive, les outre-mer ne souffrent pas d’un déficit de notoriété. Si certaines destinations souffrent d’une « visibilité insuffisante » ou d’une image trop « vieillissante », elles restent globalement connues du public français. Ainsi 48% des Français citent spontanément la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, 26% Tahiti, 21% la Guyane, 15% la Nouvelle- Calédonie, 11% Mayotte, 9% Saint-Pierre-et-Miquelon, 5% Saint-Martin, 3% Wallis- et-Futuna, et 2% Saint- Barthélémy.
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