- AFP | Crée le 18.07.2024 à 11h52 | Mis à jour le 18.07.2024 à 11h52ImprimerLe militant et leader de la CCAT, Christian Téin, est soupçonné d’avoir commandité les exactions. Photo Archives LNC / Baptiste Gouret"Plus personne ne s’occupe" de la Nouvelle-Calédonie du fait de l’incertitude politique à Paris, s’est alarmé, mercredi, le leader de la CCAT Christian Tein, qui ne comprend toujours pas pourquoi il est détenu à la prison de Mulhouse-Lutterbach, à plus de 17.000 kilomètres de chez lui.
"Nous, on veut vivre comme tous les autres peuples, être reconnus chez nous et pouvoir cheminer ensemble. Et le nouveau gouvernement, j’espère de tout cœur, va pouvoir prendre les choses à bras-le-corps. Parce que là, il n’y a plus personne qui s’occupe de nous", a déclaré Christian Tein lors d’une visite de l’eurodéputée écologiste Marie Toussaint, à laquelle l’AFP a pu assister.
"Il faut apaiser les choses et il faut que la justice, là-bas, regagne la confiance des populations kanak. Parce que pour nous, il y a un fossé énorme entre le pouvoir judiciaire et la population kanak", ajoute le porte-parole de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), emprisonné à Mulhouse et placé à l’isolement depuis le 23 juin.
Soupçonné d’avoir orchestré les exactions contre la réforme électorale en Nouvelle-Calédonie, mis en examen notamment pour complicité de tentative de meurtre et association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime, Christian Tein s’est entretenu dans sa cellule durant une vingtaine de minutes avec Marie Toussaint.
"On a quand même vécu 30 ans de paix, ce n’est pas rien. Des gens comme Jean-Marie Tjibaou ou Jacques Lafleur ont initié cette démarche de paix. Puis malheureusement cette fragilisation en quelques jours a foutu en l’air 30 ans de paix", poursuit M. Tein, s’exprimant sur un ton calme.
"Faire les choses pacifiquement"
La réforme du corps électoral, qui a mis le feu aux poudres sur le Caillou depuis le 13 mai, a "toujours été la mère de toutes les batailles et cristallise encore les populations de la Nouvelle-Calédonie".
"Accélérer le calendrier tel qu’il a été fait, ce n’était pas la meilleure des solutions. C’est emmener la population calédonienne dans le mur […] Il y a tellement de belles choses à faire dans ce pays (plutôt) que de venir s’emmerder dans une cellule de quelques mètres carrés. Parce que moi, je n’ai pas souhaité ça. J’ai toujours voulu faire les choses pacifiquement", insiste le leader kanak.
"Depuis 1853, l’histoire de la Nouvelle-Calédonie ne fait que se perpétuer à travers le temps. Il faut déboucher à un moment, il faut mettre les choses à plat définitivement. On peut trouver des solutions pour ce pays. Il faut simplement que les hommes et les femmes de bonne volonté créent les conditions, c’est pas plus dur que ça", estime Christian Tein qui devait recevoir, pour la première fois depuis son incarcération, la visite de sa compagne mercredi après-midi.
"Peuple généreux"
"Je remercie le peuple de France, c’est un peuple généreux : si on a pu développer notre pays, c’est avec les dotations des impôts et ces honorables Français qui sont dans toutes les régions de France. Je sais reconnaître ça. J’espère qu’il y a un beau soleil qui va se lever un jour pour ces deux peuples, le peuple kanak et le peuple de France", ajoute-t-il. "Mais je pense que ce n’est pas en nous emmenant loin, moi et les autres camarades, qu’on va trouver une solution."
Christian Tein, qui se considère comme un "prisonnier politique", admet être incarcéré dans de bonnes conditions, même si "c’est difficile par rapport à l’éloignement".
"Il est hébergé dans des conditions à peu près satisfaisantes", a relevé Marie Toussaint. "Mais il y a un hic : c’est évidemment le fait que ce soit un prisonnier politique et qu’il est traité comme tel. Il est mis en quartier d’isolement pour des raisons politiques, des raisons médiatiques qui n’ont aucun trait à son comportement. Et il est à plus de 17 000 kilomètres de sa famille."
Deux gendarmes et huit civils ont été tués depuis le 13 mai et près de 500 membres des forces de l’ordre blessés en Nouvelle-Calédonie, selon le Haut-commissariat.
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