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    Nouvelle Calédonie
  • Anthony Tejero | Crée le 15.07.2024 à 18h50 | Mis à jour le 15.07.2024 à 18h53
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    Onze points étaient à l’ordre du jour, ce lundi 15 avril, dont le budget supplémentaire 2024 et "diverses dispositions" pour répondre aux conséquences financières et sociales des exactions. Photo A.T.
    Les élus de la province Sud ont adopté dans la douleur le budget supplémentaire mais aussi de nouvelles dispositions pour "répondre" aux conséquences financières des émeutes. Si l’exécutif entend davantage venir en aide aux victimes des exactions, il a décidé de durcir certaines mesures sociales concernant notamment les conditions d’accès aux bourses et la participation aux frais médicaux qui s’adressent aux populations les plus démunies. Un choix qui fait bondir l’ensemble des élus de l’opposition.

    Ambiance électrique ce lundi après-midi dans l’hémicycle de la province Sud où les élus n’ont pas manqué de s’écharper copieusement sur fond de crise politique et économique dans le pays depuis deux mois. Les exactions ont, sans surprise, été au cœur des débats mais également de l’ordre du jour puisque la Maison bleue s’est penchée sur les "priorités absolues" qu’elle compte mettre en œuvre pour "répondre aux conséquences financières et sociales" de ces violences.

    Des milliards de ressources fiscales en moins

    Des effets qui ne se sont pas fait attendre puisque l’examen de son budget supplémentaire a d’abord été l’occasion de rappeler que les collectivités du pays vont devoir faire face à une "baisse sans précédent de leurs ressources fiscales", qui devrait causer un manque à gagner de 29 milliards de francs sur le Caillou et de près de 8 milliards rien que pour la province Sud cette année. Autre sujet d’inquiétude : la fiscalité additionnelle qui n’est plus reversée par le gouvernement depuis deux mois et qui ampute les comptes de la Maison bleue de 3 milliards de francs.

    Dans ce contexte, l’exécutif a décidé de trancher en prenant des décisions drastiques sur les mesures sociales jusque-là en vigueur sur son territoire, principale raison des passes d’armes parfois véhémentes entre les élus de la majorité et de l’opposition. Ces derniers (Éveil Océanien, Calédonie ensemble et FLNKS) se sont abstenus de voter le budget supplémentaire et se sont tous opposés aux propositions de l’exécutif pour réformer la politique sociale. Après l’annonce de la suspension de l’aide médicale gratuite pour les personnes les plus démunies, dès ce lundi, la chef de la collectivité, Sonia Backès entend également durcir certaines dispositions en vue de dégager des fonds qui permettront d’aider les victimes des exactions, notamment celles dont la maison ou le cabinet médical a brûlé ou encore les entreprises contraintes d’assurer une surveillance de jour comme de nuit pour éviter leur destruction. En clair, il s’agit de doubler le ticket modérateur (le montant minimum à payer pour les bénéficiaires de l’aide médicale), en le passant de 10 à 20 %, de conditionner l’accès aux bourses, aux aides scolaires ou encore aux logements sociaux, à une obligation de 10 ans de résidence en province Sud.

    Un changement de cap net, après des années de "politique sociale extrêmement généreuse et très active en matière d’insertion et d’aides aux familles" que l’institution, qui "s’est battue pour maintenir les fondamentaux de la solidarité" n’a plus les moyens de payer, assure le premier vice-président Philippe Blaise, qui estime que l’exécutif est contraint d’opérer des choix "qu’on n’a pas voulus", imposés par un "budget d’économie de guerre" engendré par les émeutes.

    "Une rupture d’égalité de traitement"

    Une vision que ne comprennent pas les élus de l’opposition à commencer par Petelo Sao, de l’Éveil océanien pour qui cette proposition " va mettre à terre la solidarité et l’entraide en province Sud", tout comme "l’économie se retrouve déjà à terre". Le conseiller pointe des mesures qui vont accentuer "la paupérisation sanitaire" des personnes "dans le besoin" qui vont "continuer de s’enfoncer encore plus dans le gouffre", alors même que cette crise devrait inviter à "repenser" le système social et de santé.

    Pour la représentante du FLNKS Sud, ces mesures sont "une rupture d’égalité de traitement de la population face à la structure publique", déplore Amandine Darras, qui ne cache pas ses inquiétudes : "Quels seront les impacts sur tous les enfants qui n’auront plus de bourses simplement parce qu’ils sont originaires du Nord et des îles ? Comment ces personnes vont-elles continuer d’aller à l’école, de se soigner ? Le principe de solidarité, c’est pour tout le monde. "

    "Un acte de barbarie"

    Mais c’est sans doute Philippe Gomès qui a eu la palme des critiques les plus acerbes envers ce texte, accusant l’exécutif d’être "anti-pauvres", anti-malades", "anti-boursiers", "anti-Kanak et océaniens" ou encore "anti-travailleurs modestes". Et ce, "au titre des ajustements budgétaires nécessaires mais menés avec une détermination sans faille pour toujours taper sur les mêmes", assène le leader de Calédonie ensemble, qui s’adresse sans détour à Sonia Backès : "Il aurait été plus courageux de demander directement comment renvoyer les gens, en majorité les plus pauvres, vers les îles et le Nord. Ce texte est l’acte 1 de l’apartheid", pénalisant près de 55 000 personnes dont 26 000 pour l’aide médicale. Cette suspension décidée de "manière unilatérale" sans en débattre avec les conseillers constitue, selon le parti "un acte de barbarie" qui contribue "à monter les Calédoniens les uns contre les autres". Si Philippe Gomès reconnaît qu’il faut réaliser des économies drastiques, d’autres possibilités existent plutôt que "de mettre en danger la vie d’autrui".

    "Des choix douloureux"

    Des propos qui ont provoqué un tollé parmi les élus de la majorité. À commencer par Nina Julié, déplorant qu’aucune autre solution alternative "à ces choix douloureux" n’ait été avancée parmi leurs adversaires. "Nous devons faire des mesures d’économies pour rééquilibrer notre trésorerie ne serait-ce que ce mois-ci. Et malheureusement, je crains qu’il y en ait d’autres à venir, glisse la représentante de Générations NC qui s’agace que les élus "soient mis sur le banc des accusés". "Nous croyions en la capacité collective de construire un pays, mais aujourd’hui nous subissons tous les conséquences des exactions, si ce n’est le coup d’État de la CCAT dont tout le monde paye le prix fort. En effet, cela touchera encore plus les personnes les plus fragiles, mais ce n’est pas de notre fait. Et si le gouvernement avait financé ce qu’il doit à la province depuis deux mois, nous n’en serions peut-être pas là aujourd’hui."

    "L’échec d’années de politique sociale"

    Des propos appuyés par Virginie Ruffenach (Le Rassemblement) qui "s’inscrit en faux" devant le "tableau caricatural" dépeint par Calédonie ensemble, qui "refuse de voir en face l’échec d’années de politique sociale" menée sous leur mandature provinciale qui a "conduit les gens des îles et du Nord à venir s’installer et même s’entasser dans des logements sociaux construits en masse, alors même que le rééquilibrage avait l’objectif de fixer les populations là où elles ont un cadre de proximité : une famille, une école, des structures coutumières, etc." Ce qui conduit l’élue à prôner de désormais "faire mieux, mais différemment."

    Pour clore ces débats houleux, Sonia Backès a tenu à mesurer certains propos, rappelant que les centres-médicaux-sociaux (CMS) restent ouverts pour accueillir tous les malades, notamment ceux atteints de graves pathologies, et que ces dispositions ne concernent pas par exemple les enfants de moins de trois ans, les personnes handicapées ou encore les femmes enceintes.

    "Cette décision ne mettra en danger la vie de personne, je m’y engage solennellement, assure la présidente de la Maison bleue, qui ne se prive pas de dénoncer l'"indignation sélective" de ses adversaires. "Où étiez-vous quand la province des Îles a pris la même décision pour 11 000 bénéficiaires il y a quelques mois ? Je ne vous ai pas entendu. C’est vraiment deux poids, deux mesures."

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