- Baptiste Gouret | Crée le 14.05.2024 à 15h37 | Mis à jour le 14.05.2024 à 17h09ImprimerEntouré de responsables politiques et du représentant de la gendarmerie, le haut-commissaire a tenu une conférence de presse ce mardi en fin de matinée pour faire le point sur les émeutes en cours dans l'agglomération. Photo Baptiste GouretLouis Le Franc a convié la presse, ce mardi, pour faire un bilan de cette nuit et de cette matinée d'émeutes, particulièrement marquée dans le Grand Nouméa, et les mesures prises par l'Etat pour faire face aux violences qui s'intensifient.
La société Le Froid menace d'exploser, trente jeunes sommés d'en sortir
Principale préoccupation de la matinée pour Louis Le Franc, haut-commissaire : la présence "d'une trentaine d'individus", la plupart très jeunes, au sein de l'usine de la société Le Froid, victime d'un incendie dans la nuit et toujours en proie aux flammes ce mardi. Lors de la conférence de presse, organisée ce mardi en fin de matinée, le haut-commissaire a demandé aux occupants de l'usine de quitter instamment les lieux pour leur propre sécurité car "deux cuves d'hydrogène sous pression menacent d'exploser". L'éventuelle déflagration pourrait atteindre une zone d'environ "300 mètres" autour de l'usine. "Nous n'arrivons pas à les déloger ni à communiquer avec eux, déplorait Louis Le Franc. Ils ne se rendent pas compte du danger qu'ils courent."
35 gendarmes blessés et 48 interpellations
"Les forces de l'ordre ont vécu une nuit très difficile", a confirmé Louis Le Franc. En tout, 35 gendarmes ont été blessés, dont certains "ont dû être évacués en direction du Médipôle". Sur l'agglomération du Grand Nouméa, où se concentrent toutes les émeutes, "48 personnes ont été interpellées", dont une grande majorité de jeunes. "Nous sommes confrontés à un véritable déchainement de haine", constate le général Nicolas Matthéos, commandant de la gendarmerie de Nouvelle-Calédonie. Les actes de violence envers les forces de l'ordre proviennent majoritairement de "jeunes agressifs et souvent alcoolisés" qui cherchent "à nous faire mal". Pour le général, "ces agressions visent à tuer, pas simplement à intimider".
Exfiltrations, pillages et maisons brûlées
Dans la capitale, les forces de l'ordre sont concentrées sur trois "points chauds" sur lesquels la gendarmerie vient en renfort de la police nationale : Montravel, Ducos et Vallée-du-Tir. Dans ce dernier quartier, de nombreuses exactions ont été commises toute la nuit. Des personnes ont été sorties de leurs domiciles par les manifestants avant que leurs habitations soient brûlées sous leurs yeux. Dans la nuit, le GIGN est intervenu pour extraire un homme âgé de 81 ans de sa maison en flamme. Comme l'avait dévoilé le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, à la tribune de l'Assemblée nationale ce mardi matin, il s'agissait du père de Sonia Backès, présidente de la province Sud. Présente à la conférence de presse au haut-commissariat, celle-ci a confirmé l'information et remercié les forces de l'ordre pour leur action. Elle a également qualifié les violences, commanditées selon elle par la CCAT, "d'actes terroristes".
"Les Calédoniens commencent à s'énerver", avertit Sonia Lagarde
Egalement conviée à la conférence de presse, la maire de Nouméa Sonia Lagarde a d'abord dressé une liste non-exhaustive de lieux touchés par des pillages et incendies : la pharmacie de Kaméré, un dock de la rue Papin, le Super U de Kaméré, Ducos Factory, l'usine Biscochoc, Bureau Vallée, la société Le Froid… Durant le point presse, la première édile a également été informée d'affrontements en cours au rond-point de l'Eau-Vive entre brandes opposées. "Les Calédoniens commencent à s'énerver" et à réagir aux blocages et violences, a-t-elle averti. "On arrive doucement sur le terrain d'une guerre civile", s'est-elle inquiétée, appelant "au calme". "Cette affaire de dégel est une affaire purement politique."
La maire a également accusé la CCAT d'être responsable des émeutes en cours. "Est-ce qu'on arrive, au sein de la CCAT, à maîtriser ce qu'il se passe ? On a le sentiment que ça échappe aussi aux responsables" de ce "comité de lutte" créé "de toutes pièces par le FLNKS" qui a "accouché d'un monstre", a regretté Sonia Lagarde.
Des renforts attendus prochainement
Les forces de gendarmerie supplémentaires (brigade mobiles et GIGN) demandées par le haut-commissaire "sont engagés" et devraient partir de l'Hexagone sous peu. Aucune date de leur déploiement sur le Caillou n'a toutefois été communiquée par Louis Le Franc. Actuellement, 700 policiers sont mobilisés à Nouméa, soutenus par 600 gendarmes et 600 gendarmes mobiles également déployés dans le reste de l'agglomération.
Nuit très tendue à Saint-Louis, d'autres points chauds à Dumbéa et Païta
Quatre escadrons de gendarmerie et l'ensemble des forces du GIGN ont été engagés toute la nuit pour "reprendre la contrôle de la route provinciale" qui longe la tribu de Saint-Louis, au Mont-Dore. Sur un portion "d'1,8 km", des centaines de jeunes affrontent depuis lundi les forces de l'ordre. Des "tirs tendus" en direction des gendarmes à l'aide de "gros calibres" ont été constatés. Des caméras de vidéosurveillance ont également été détruites dans différents points de la commune du Mont-Dore. A Dumbéa, le secteur d'Apogoti et du pont des Erudits fait également l'objet d'affrontements et de blocages depuis lundi soir. "Il y a un déploiement important de jeunes de moins de 15 ans très agressifs envers les gendarmes, a souligné Louis Le Franc. Ils sont complètement déchainés et donnent l'impression de n'avoir aucune limite."
Du côté de Païta, les militants sont mobilisés "au rond-point de Tontouta", dans le col de la Pirogue ainsi qu'au niveau des entrées sud et nord du village, a indiqué la maire Maryline D'Arcangelo.
Christian Tein mis en garde par le haut-commissaire
Alors qu'il s'exprimait au même moment sur radio Djiido, le responsable de la CCAT, Christian Tein, a été nommément visé par Louis Le Franc : "Il a intérêt à siffler la fin de la récréation sinon je vais le rendre responsable de tout ce qui se passe en ce moment." Le haut-commissaire a également demandé aux responsables indépendantistes de demander aux jeunes d'arrêter les exactions commises. "Sinon il y aura des morts."
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