- Agnès COUDURIER / AFP | Crée le 29.05.2024 à 20h10 | Mis à jour le 29.05.2024 à 20h10ImprimerÀ Païta Nord, plus de 200 militaires sont chargés de déblayer la RT1 tout en s’assurant qu’aucun barrage n’y sera réinstallé la nuit. Photo Delphine MAYEUR / AFPLes forces de l’ordre ont la mission de déblayer et sécuriser la route qui mène à l’aéroport de La Tontouta, fermé jusqu’à dimanche au moins, conséquence des émeutes qui secouent la Nouvelle-Calédonie depuis une quinzaine de jours. La tâche s’avère compliquée car le chemin est semé d’embûches.
Des gendarmes mobiles s’abritent derrière leurs véhicules et mettent en joue la colline boisée surplombant la route reliant Nouméa à La Tontouta. Un homme armé se cache dans les fourrés, le long de cet axe stratégique que les forces de l’ordre tentent de sécuriser tant bien que mal. Car si les flammes de l’opposition à la loi constitutionnelle se sont en grande partie éteintes, des braises restent encore vives ici ou là.
Depuis Nouméa, la route est d’abord fluide, seuls les débris qui jonchent la chaussée rappellent les émeutes.
À Apogoti, un barrage brûle légèrement, avec quelques militants à l’air fatigué qui filtrent encore mollement le passage des automobilistes. Une enceinte portative crachote du reggae, et un caddie posé en équilibre précaire sur une carcasse de voiture est alimenté en essence pour former le brasier du jour.
Route bloquée
Mais à Païta Nord, la route est bloquée par une intervention des forces de l’ordre. Dans l’air se mêlent une odeur de gaz lacrymogène, mais aussi le vrombissement d’un drone de surveillance.
"Souriez, vous êtes filmés", s’amuse Steve, 54 ans, qui ne donne pas son nom complet, et qui, désabusé, "attend pour essayer d’aller travailler".
"Gendarmerie nationale, les mains en l’air !", entend-on à 100 mètres, tandis que les automobilistes devisent tranquillement à côté de leurs voitures.
"Sur le petit monticule qui est situé à droite de notre dispositif, depuis ce matin on a un individu avec un fusil à lunette qui circule", qui "était présent quand on est arrivé ce matin et qui s’est caché dans les fourrés", explique à l’AFP Stéphane P., commandant du groupe tactique du Mont-Dore.
"Pour l’instant on n’a aucune menace"
"Un tireur a été vu au bord de la route", abonde un autre militaire, qui a requis l’anonymat, et qui conseille de passer le tronçon en roulant vite, après la levée de l’intervention.
"Pour l’instant on n’a aucune menace verbale proférée à notre encontre, on est vigilant parce qu’on est dans une zone où, au vu de ce qu’il y a sur le terrain, il y a eu beaucoup d’opposition, donc on se prépare à avoir une opposition peut-être dans la journée qui reviendrait sur le compartiment de terrain qu’on est en train de nettoyer", avance Stéphane P.
À Païta Nord, ils sont plus de 200 militaires chargés de déblayer la route tout en s’assurant qu’aucun barrage n’y sera réinstallé la nuit. L’objectif est que cet axe, qui permet de relier Nouméa au nord de la Grande Terre, "soit libéré d’ici la fin de la semaine", affirme aussi le porte-parole.
"L’engagement continu des policiers et des gendarmes sur le terrain permet de poursuivre la sécurisation des communes de Païta, Dumbéa et du Mont-Dore", a affirmé le haut-commissaire de la République Louis Le Franc dans un communiqué publié à la mi-journée localement. À l’aide de "80 véhicules", le dégagement des voies progresse, et "141 carcasses ont pu être retirées ces dernières 24 heures dans le secteur du pont des Érudits", à Dumbéa, a précisé le représentant de l’État.
"On joue au chat et à la souris"
Un peu plus au Nord, la route est un temps bloquée en raison du déblaiement des carcasses. Et au col de La Pirogue, des militants sourient auprès d’une voiture en feu et devant des véhicules qui circulent librement.
"Nos responsables nous disent de maintenir les barrages filtrants, pacifiquement, dans le respect de tous les usagers", dit à l’AFP Hino, de la tribu de Saint-Laurent, qui ne donne que son prénom.
"On a suivi le mot d’ordre : on joue au chat et à la souris. Les forces de l’ordre peuvent enlever (les barrages), mais nous derrière on les remet". Craint-il les forces de l’ordre qui vont arriver ? "On les craint, mais ils n’ont pas à être agressifs, nous, on n’est pas agressifs, toujours pacifiques".
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