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    Grand Nouméa
  • Baptiste Gouret | Crée le 29.05.2024 à 19h24 | Mis à jour le 29.05.2024 à 19h46
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    Les premiers jours de la crise, de nombreux patients ont été privés de soins à domicile, en raison des difficultés pour les professionnels de santé d’accéder à certains quartiers. Photo Baptiste Gouret
    Aux premiers jours de la crise, une partie des professionnels de santé ont stoppé leurs visites à domicile. Pour les patients, très fragiles et souvent incapables de se déplacer, il a fallu compter sur la famille pour compenser cet arrêt soudain de soins. Depuis quelques jours, infirmiers et spécialistes sont de retour dans les quartiers. Une libération pour les aidants familiaux.

    Installé au fond de son siège, la télévision comme bruit de fond et la grille de mots croisés jamais bien loin, Antonin observe sa femme réaliser quelques pas hésitants au milieu du salon, soutenue par Élise*, kinésithérapeute. Une scène devenue rare ces deux dernières semaines. Au déclenchement des émeutes, "plus personne ne venait, il a fallu que je me débrouille", raconte le Tahitien, arrivé en Nouvelle-Calédonie dans les années 70. Les premiers jours, il a dû se charger seul du bain quotidien de sa femme, très affaiblie, et de sa prise de médicaments, aidé d’un pilulier.

    Des patients "résilients et reconnaissants"

    Durant la première semaine de crise, une partie des professionnels de santé ont stoppé les soins à domicile en raison des difficultés de circulation et d’accès à certains quartiers, souvent bloqués ou peu sécurisés. L’accalmie des derniers jours leur a permis de revenir auprès de ce public fragile. Un soulagement pour les proches, qui ont tenté, tant bien que mal, de prendre le relais et pallier cette absence de soins. "Je suis épuisée", lâche Odile*, quand elle voit arriver Élise.


    Antonin a pris le relais des soignants aux premiers jours des émeutes pour s’occuper de sa femme. Photo Baptiste Gouret

    Son mari, atteint de la maladie de Parkinson, "se réveille toutes les deux heures en ce moment". Les premiers jours des émeutes, elle a fait de son mieux pour s’occuper de lui. "On a la chance de partager le terrain avec nos enfants et nos petits-enfants", qui, en plus de tenir les barrages qui protègent leur quartier, lui ont donné la main pour prendre soin de son mari. Depuis quelques jours, "les infirmières sont de retour", se réjouit Odile. Élise aussi s’en félicite. La kinésithérapeute a repris une tournée presque normale, même si elle a dû en écarter certains patients, installés dans des quartiers encore trop à risques. Reste que ceux qu’elle retrouve font tous preuve "de beaucoup de ressources, de résilience et de reconnaissance".

    Une longue première semaine

    Dans le salon de sa maison, perchée sur les hauteurs de Robinson, Nicole* s’empare de son téléphone et ouvre le calendrier : "Oui c’est ça, c’est le samedi 11 mai qu’on les a déménagés", confirme la sexagénaire, son chihuahua sous le bras. Trois jours avant le début des émeutes, elle et son mari, Thierry*, ont pris la route du Domaine de Nouré pour vider la maison de ses parents, 88 ans chacun, et les accueillir définitivement chez eux, au Mont-Dore. Ça faisait longtemps que le couple y songeait, pour en finir avec les nombreux allers-retours que s’efforçait de faire Nicole pour s’occuper d’eux. Depuis plusieurs mois, Thierry réaménageait le domicile familial pour consacrer une aile de la maison à ses beaux-parents. La dégradation de l’état de santé de la mère de Nicole a accéléré la décision de les faire venir. Un timing finalement idéal. Soixante-douze heures après leur installation à Robinson, le trajet jusqu’au Domaine de Nouré était devenu impossible.


    Depuis quelques jours, les professionnels de santé ont repris leurs tournées à domicile. Photo Baptiste Gouret

    La première semaine d’émeutes s’est toutefois avérée très longue dans la petite demeure accrochée à la montagne. "Dès les premiers jours, ma mère est tombée et s’est cassé le bras", raconte Nicole. Impossible de l’emmener jusqu’au Médipôle, dont l’accès n’était plus garanti. Pas de pompiers ni de médecin à l’horizon. Nicole et Thierry ont pu compter sur un couple de voisins, infirmiers, pour appliquer les premiers soins et "mettre son bras en écharpe". Ce n’est qu’au bout de cinq jours qu’une ambulance est venue chercher l’octogénaire pour l’emmener au Médipôle, où elle est encore en observation huit jours après son admission.

    Cohésion familiale

    De ces deux semaines anxiogènes, Malia* veut toutefois en retirer du positif. "Dans ce malheur, on a recréé une cohésion au sein de la famille comme dans le travail", constate l’aide-soignante au Médipôle, qui s’occupe de sa mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer.

    Huit à la maison, trois générations coincées sous le même toit, et une solidarité familiale qui en sort renforcée. Malia parvient même à déceler un aspect positif à la pathologie de sa mère : "Elle entend les détonations la nuit, mais elle ne sait pas ce qu’il se passe. Elle ne réalise pas, et finalement ce n’est pas plus mal."

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